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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 128

Le mercredi 31 mai 2023
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le mercredi 31 mai 2023

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Connie Walker

Félicitations pour l’obtention des prix Pulitzer et Peabody

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, j’aimerais aujourd’hui rendre hommage à une journaliste crie d’origine saskatchewanaise, Connie Walker, qui vient de remporter un prix Pulitzer et un prix Peabody pour sa série de balados Stolen: Surviving St. Michael’s, qui a été louée pour les révélations qu’elle contient et la manière édifiante dont elle raconte ce chapitre de notre histoire.

Mme Walker a grandi sur le territoire de la Première Nation d’Okanese, à environ 118 kilomètres au nord-est de Regina. Son projet, qui a commencé comme une démarche personnelle visant à trouver des réponses sur le passage de son père au pensionnat St. Michael’s, s’est transformé en enquête sur les mauvais traitements systémiques infligés aux enfants autochtones qui ont été forcés de fréquenter ce pensionnat, dont certains autres membres de sa famille élargie.

Grâce aux recherches méticuleuses de Connie Walker, à la manière captivante dont elle raconte son histoire et à sa compassion sans bornes, ce balado nous offre un nouveau moyen de faire la lumière sur la douloureuse histoire des pensionnats du Canada. Grâce à ses talents journalistiques exceptionnels, Mme Walker a réussi à illuminer l’un des chapitres les plus sombres de notre histoire, qui a longtemps été tu et gardé secret. À chaque épisode, elle emmène les auditeurs dans une série de découvertes, en plus de permettre aux survivants de raconter leur histoire et d’attirer l’attention du public sur ce qu’ils ont vécu.

En célébrant les réalisations de Connie Walker, nous devons reconnaître le courage et la résilience des survivants qui ont parlé de leurs expériences douloureuses. En croyant à la sincérité de l’engagement de Mme Walker à l’égard de la vérité et de la justice, les survivants ont permis que leur voix soit entendue, et bon nombre d’entre eux se sont remémoré des souvenirs traumatisants dans l’espoir de favoriser la compréhension et de créer un avenir meilleur pour les générations futures. Ces prix reconnaissent non seulement le talent exceptionnel de conteuse de Connie Walker, mais aussi la bravoure et la résilience des survivants qui ont raconté leur histoire.

L’inclusion de perspectives autochtones dans les médias bénéficie à l’ensemble des Canadiens. En accueillant ces récits, nous nous ouvrons à différents modes de connaissance, d’existence et de rapports sociaux. Les histoires autochtones ont le pouvoir d’inspirer, d’éduquer et de susciter des échanges enrichissants qui transcendent les frontières culturelles. Pour en arriver là, il nous faut des façons nouvelles et accessibles pour amplifier les voix des Premières Nations comme celle de Mme Walker. Nous devons appuyer les cinéastes, les écrivains, les journalistes et les créateurs de contenu autochtones et les encourager à présenter leurs histoires. En investissant dans diverses perspectives, nous pouvons créer un paysage médiatique qui reflète la diversité de la société canadienne. Espérons que les réalisations de Connie Walker continueront à nous inciter tous à écouter, à apprendre et à agir.

Merci et hiy kitatamîhin.

Des voix : Bravo!

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Dr Ian Bowmer. Il est l’invité de l’honorable sénateur Ravalia.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le Dr Ian Bowmer

L’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia : Merci, Votre Honneur. Permettez-moi d’ajouter mon nom à la liste des personnes qui vous transmettent leurs félicitations. C’est un plaisir de vous voir à la présidence.

Honorables sénateurs, c’est avec un profond sentiment de respect et de gratitude que je prends la parole aujourd’hui pour saluer les réalisations remarquables du Dr Ian Bowmer, qui est présent parmi nous aujourd’hui. En tant que clinicien hautement qualifié, enseignant en médecine, chercheur et pionnier, le Dr Bowmer s’est forgé une carrière qui a influencé toute une génération de médecins.

Grâce à ses 40 ans d’expérience à titre d’interniste, de spécialiste des maladies infectieuses et de prestataire de soins et chercheur, le Dr Bowmer est reconnu comme une autorité internationale et un expert mondial dans le domaine du VIH-sida. Il a occupé plusieurs postes clés au cours de sa carrière. Il a été élu président du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada en février 2019. En mars dernier, il a accepté ce rôle à titre intérimaire. Son engagement résolu et inébranlable lui a permis de mener le collège royal à bon port à travers les eaux tumultueuses de la récente pandémie. Le Dr Bowmer a également été directeur général et chef de la direction du Conseil médical du Canada pendant 11 ans avant de prendre sa retraite en octobre 2018. Il a reçu plusieurs prix, notamment la médaille du 125e anniversaire de la Confédération du Canada, l’élection au collège royal des médecins de Londres, en Angleterre, et la médaille du 150e anniversaire du Sénat pour ses contributions à la collectivité, et j’en passe.

Au-delà de ses réalisations professionnelles, le Dr Bowmer est reconnu pour sa compassion et son dévouement à l’égard des collectivités mal desservies. Il a participé activement à des programmes de sensibilisation, offrant bénévolement son temps et son expertise pour améliorer l’accès aux soins de santé et réduire les disparités en matière de santé, ce qui a amélioré considérablement la vie de nombreuses personnes.

Ma propre carrière a été profondément influencée par sa vision et sa contribution à l’amélioration de la médecine rurale et à distance. Le Dr Bowmer est professeur émérite et l’ancien doyen de la Faculté de médecine de l’Université Memorial. Il m’a nommé à cette faculté en 1992, ce qui signifie que, oui, il est bel et bien mon ancien patron. C’est quelqu’un que je continue d’admirer et de respecter. Dans ma province, il a jeté les bases d’une formation médicale longitudinale dans un autre cadre que les soins tertiaires. Ian a une passion profonde pour les arts et la littérature, de superbes talents culinaires à la Gordon Ramsay, de même qu’une personnalité vraiment altruiste et bienveillante, le tout accompagné d’un sens de l’humour malicieux.

Mes collègues sénateurs et moi vous félicitons de vos nombreuses contributions à notre province, Terre-Neuve-et-Labrador, et à notre pays ainsi que de vos réalisations mondiales.

Merci. Meegwetch.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Maggie Ip, fondatrice, de Terry Yung, président du conseil d’administration, de Queenie Choo, présidente-directrice générale, et des leaders du groupe S.U.C.C.E.S.S., de la Colombie-Britannique. Ils sont les invités des honorables sénateurs Martin et Woo.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le groupe S.U.C.C.E.S.S.

Félicitations à l’occasion de son cinquantième anniversaire

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, c’est un honneur de prendre la parole aujourd’hui pour souligner le 50e anniversaire de l’organisme S.U.C.C.E.S.S., acronyme de Society of United Chinese Community Enrichment Social Services.

S.U.C.C.E.S.S. a été fondé en 1973 par un groupe de visionnaires qui croyaient en la bonté des gens et en l’importance du service communautaire. Leur objectif était d’aider les néo-Canadiens d’origine chinoise à surmonter les obstacles linguistiques et culturels. Maggie Ip, Jonathan Lau, Mei-Chan Lin, Pauline To et Linda Leong ont créé S.U.C.C.E.S.S. il y a un demi-siècle, et c’est aujourd’hui l’un des organismes de bienfaisance les plus respectés de la Colombie-Britannique.

S.U.C.C.E.S.S. est l’un des plus importants organismes multiculturels et multiservices de la Colombie-Britannique. Il fournit des services d’aide à l’établissement des nouveaux arrivants, d’aide à l’emploi, d’enseignement de l’anglais, de santé et de logement pour les aînés, ainsi que des services d’aide aux entreprises, d’assurance automobile et de développement économique, communautaire et social. Cet organisme milite également activement afin que la société évolue pour le mieux.

(1410)

Aujourd’hui, sous la direction sa directrice générale, Queenie Choo, et du président de son conseil d’administration, Terry Yung, les quelque 900 professionnels et 2 000 bénévoles de S.U.C.C.E.S.S., qui sont répartis dans 30 bureaux situés autant dans la région du Grand Vancouver et de Fort St. John qu’en Chine et en Corée du Sud, aident les immigrants à toutes les étapes de leur expérience canadienne.

C’est à Séoul, en Corée du Sud, que S.U.C.C.E.S.S. a ouvert son premier bureau à l’étranger, dans le cadre du Programme d’intégration et d’engagement actifs. Ce programme facilite la transition des nouveaux arrivants au Canada en leur offrant des services axés sur l’intégration dans la communauté et sur le marché du travail avant même leur départ de la Corée du Sud.

Si la Colombie-Britannique et le Canada sont aussi diversifiés de nos jours, c’est en partie grâce aux pionniers, aux visionnaires et aux dirigeants des organismes comme S.U.C.C.E.S.S., qui ont compris le rôle de premier plan que peuvent jouer les organismes de bienfaisance dans la société canadienne.

Aujourd’hui, j’aurai l’honneur d’animer, conjointement avec le sénateur Yuen Pau Woo ainsi que les députés Marc Dalton, Jenny Kwan et Taleeb Noormohamed, l’activité S.U.C.C.E.S.S. sur la Colline, qui aura lieu dans l’édifice Sir John A. Macdonald de 16 h à 18 h. J’invite tous les honorables sénateurs à se joindre à nous pour célébrer le 50e anniversaire de S.U.C.C.E.S.S. Ensemble, nous pouvons faire une réalité de la vision de S.U.C.C.E.S.S. et offrir des ressources et des services essentiels aux nouveaux arrivants ainsi qu’aux aînés, aux familles et aux personnes dans le besoin.

Honorables sénateurs, veuillez vous joindre à moi pour féliciter S.U.C.C.E.S.S. pour ses 50 années d’excellents services.

Des voix : Bravo!

[Français]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Christine St-Pierre, de Maria Mourani et de Marie-Michelle Desmeules, et de membres du Groupe parlementaire multipartite de lutte contre l’esclavage moderne et la traite des personnes. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Miville-Dechêne.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’exploitation et la traite de personnes

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Honorables sénateurs, je veux rendre hommage à mes invités qui ont tous contribué à lutter contre l’exploitation sexuelle au Québec. Le Groupe parlementaire multipartite contre l’esclavage moderne et la traite des personnes, dont je suis co-présidente, a organisé un panel passionnant ce midi au Parlement sur cet enjeu.

Tout d’abord, je veux rendre hommage à la survivante Marie-Michelle Desmeules qui a été au cœur de cet enfer. Elle a été soumise aux pires violences par un proxénète pendant 10 ans; violée, a-t-elle calculé, à 25 000 reprises, et qui souffre du syndrome post-traumatique. Merci d’avoir témoigné, madame.

Depuis 2016, le gouvernement du Québec a modifié sa politique. On considère maintenant que la prostitution est bel et bien de l’exploitation sexuelle dans la plupart des cas.

Geneviève Albert, réalisatrice du film primé Noémie dit oui, l’expose brillamment : contrairement à ce qu’on pense, dire oui ne suffit pas à consentir; on ne peut pas se cacher derrière l’argument trompeur du consentement pour cautionner la prostitution. Seule une infime minorité de celles qui vendent des services sexuels s’en tire indemne.

Malheureusement, il n’y a pas de campagne d’information visant le grand public pour marteler que l’achat de services sexuels, c’est de l’exploitation, les mentalités changent peu.

L’ex-ministre québécoise Christine St-Pierre a siégé au sein de la Commission spéciale sur l’exploitation sexuelle des mineures. Oui, l’exercice a donné un peu plus de budgets aux policiers et aux groupes d’aide, mais c’est encore trop peu face aux besoins criants et à la banalisation du phénomène, accélérée par les réseaux sociaux.

Il y a évidemment consensus pour dénoncer la pornographie juvénile. Toutefois, que se passe-t-il une fois que ces filles, prises au piège, atteignent 18 ans? C’est là que se cristallisent toutes les contradictions du regard qu’on porte sur la prostitution, car l’exploitation continue, dans bien des cas, dans un contexte de manipulation et de contraintes financières, psychologiques ou physiques.

Ce sont des victimes comme Marie-Michelle Desmeules qui ont inspiré la criminologue et ex-députée fédérale indépendante Maria Mourani à légiférer, et notamment à ajouter la traite de personne à la liste des infractions visées par la confiscation des produits de la criminalité. Une très longue bataille, dans laquelle elle a été épaulée au Sénat par nul autre que le sénateur Boisvenu.

Parmi les nouvelles initiatives prometteuses au Québec, on note les tribunaux spécialisés en violence sexuelle pour mieux accompagner les victimes et une sorte d’école pour les prostitueurs, ce qu’on appelle au Canada anglais John School.

C’est l’agent Ghyslain Vallières de la police de Longueuil qui s’est investi dans un projet pilote destiné à changer le comportement des hommes arrêtés parce qu’ils ont acheté des services sexuels. Ces clients paient une amende, évitent les tribunaux, à condition qu’ils acceptent de participer à une journée de sensibilisation et de témoignage de survivantes.

Pour conclure, je vais paraphraser notre cinéaste : la prostitution n’est pas une fatalité, la solution est politique. Merci.

[Traduction]

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Vanessa Casiong. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Patterson (Nunavut).

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès de Dorothy E. Knowles, C.M.

L’honorable Pamela Wallin : Lorsque je suis arrivée à New York pour occuper mon poste de consule générale, peu de temps après le 11 septembre, nous avions grandement besoin de discuter et de comprendre. Nos voisins américains nous invitaient fréquemment chez eux et nous les invitions à notre tour à la résidence canadienne officielle pour discuter autour d’un bon souper. Je voulais trouver une œuvre d’art exceptionnelle à accrocher au mur de la salle à manger, car il est facile de lancer des discussions grâce à l’art. Un magnifique paysage peint par Dorothy Knowles allait être parfait. Intitulé Road to the West, le tableau attirait l’attention et permettait aux gens d’échanger. Les immenses tableaux de Knowles saisissent l’essence des lieux et présentent plus que des éléments géographiques.

Dorothy Knowles est née sur une ferme près d’Unity en 1927. La brutalité et la beauté du paysage ont été imprimées, peut-être même gravées à jamais, dans l’esprit des artistes qui ont grandi pendant la crise des années 1930.

La misère a façonné la façon dont les gens voyaient la vie et la terre. On parle du « pays de l’an prochain », un lieu où l’espoir survit, mais où règne le réalisme. La vie est dure; il faut être déterminé. C’est une inspiration pour les artistes qui y vivent. C’était la signature de Dorothy. Quand on voit un de ses tableaux, on a toujours l’impression de regarder par une fenêtre ouverte. Vous savez ce qu’on dit : en Saskatchewan, on peut apercevoir son chien s’enfuir pendant deux jours.

Ses paysages étaient effectivement à couper le souffle, mais elle peignait également des natures mortes et des portraits. Elle jardinait sans relâche sur de vieilles propriétés qu’elle partageait avec l’artiste qu’elle avait épousé, William Perehudoff, sans compter qu’elle faisait de la couture pour ses filles, même pour leurs poupées Barbie.

Dorothy avait l’intention de faire des études en biologie, mais une amie l’a persuadée de s’inscrire à un cours d’art au célèbre lac Emma. Les ateliers offerts à cet endroit attiraient des artistes de partout, notamment des États-Unis et de l’Europe. Universitaires, peintres, poètes; tous convergeaient vers la Saskatchewan, trouvant que la beauté du Nord et l’intensité de la communauté artistique y étaient tout simplement irrésistibles.

Dorothy est devenue une force puissante, une influenceuse avant même que ce nom existe, donnant aux jeunes artistes le courage de peindre. Son succès lui a valu l’Ordre du mérite de la Saskatchewan ainsi que l’Ordre du Canada, et j’ai eu l’honneur de lui décerner la médaille commémorative du 150e anniversaire du Sénat. Malgré tout, Dorothy Knowles est demeurée une personne incroyablement humble et sans prétention.

En parlant de sa carrière prolifique, elle a admis :

Je veux simplement verser cela sur la toile : mon amour pour le paysage, mon amour pour les arbres et le merveilleux éclat du ciel.

Quand on lui a demandé des conseils à savoir quoi peindre, Knowles a dit :

Installez-vous devant le panorama le plus traditionnellement pittoresque que vous pouvez trouver, puis retournez-vous et peignez ce qui se trouve derrière vous.

Dorothy Knowles est décédée paisiblement mardi dernier à l’âge de 96 ans. Elle n’a jamais cessé de peindre. Son œuvre demeurera à jamais une pierre de touche pour moi ainsi que pour bien d’autres. Merci.

Des voix : Bravo!

[Français]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Magali Portier. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice Moncion.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’Ingrid Sahu. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice Omidvar.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


(1420)

[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2021, visant à inviter un ministre de la Couronne, l’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, comparaît devant les honorables sénateurs durant la période des questions.)

Les travaux du Sénat

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, nous accueillons aujourd’hui l’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique. Je tiens à rappeler aux collègues que les questions posées au ministre doivent traiter de ses responsabilités ministérielles.

Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2021, les sénateurs ne sont pas tenus de se lever. Les questions sont limitées à une durée d’une minute et les réponses à une durée d’une minute et demie. La greffière lectrice se lèvera 10 secondes avant l’expiration de ces délais. La période des questions sera d’une durée d’une heure.

[Traduction]

Le ministère de la Sécurité publique

Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Merci et bienvenue, monsieur le ministre. Ma question concerne le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. J’ai interrogé le sénateur Gold à ce sujet lors de la période des questions du Sénat hier, mais je n’ai pas obtenu de réponse satisfaisante. J’espère que vous me fournirez une meilleure réponse aujourd’hui.

Ce comité est censé compter trois sénateurs, mais deux de ces sièges sont vacants depuis un mois. Les deux dernières fois que ce comité a été formé, le premier ministre a refusé de nommer un sénateur de l’opposition officielle. Aujourd’hui, il semble qu’il recommence.

Monsieur le ministre, si le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement est si important pour le premier ministre, pourquoi n’a-t-il pas pourvu les sièges vacants? Pourquoi pensez-vous qu’il refuse continuellement de nommer un sénateur de l’opposition officielle? Croyez-vous que l’opposition officielle devrait être représentée au sein de ce comité, oui ou non?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je vous remercie, sénateur.

Je tiens aussi à remercier les autres sénateurs de me donner l’occasion de répondre à leurs questions.

Pour répondre directement à votre question, sénateur, je crois fermement à l’importance du travail que fait le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, qui a été mis sur pied par le gouvernement libéral afin d’aller au-delà des lignes partisanes et d’inclure tous les parlementaires, y compris les sénateurs.

Le comité a déjà émis des recommandations concrètes auxquelles je me suis empressé de donner suite — je pense par exemple au coordonnateur national de la lutte contre l’ingérence étrangère ou au registre des agents étrangers —, mais il faut procéder de la bonne manière compte tenu des préoccupations qui m’ont été transmises directement par rapport à des communautés étrangères et à d’autres parties concernées.

Pour ce qui est de la composition du comité, je m’engage à faire part de vos inquiétudes au gouvernement, mais je conviens moi aussi qu’il doit être le plus représentatif possible, comme l’envisageait d’ailleurs le gouvernement dès le départ.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le ministre. Il s’agit certainement d’une meilleure réponse que celle que j’ai obtenue hier, mais elle n’est pas aussi complète que je l’aurais souhaité.

Le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, avait informé un ancien chef du Parti conservateur du Canada que lui et son caucus parlementaire étaient la cible d’une campagne de désinformation sophistiquée et de suppression de votes orchestrée par la République populaire de Chine avant et pendant les élections générales de 2021.

Le SCRS avait fait savoir à Erin O’Toole que le régime communiste avait payé pour créer des messages de désinformation contre lui. Or, votre patron, en l’occurrence le premier ministre, ainsi que le rapporteur dont il a créé le poste affirment encore aux Canadiens que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement suffit pour faire enquête sur l’ingérence de la part du gouvernement en place à Pékin. Vous affirmez qu’un comité secret ferait mieux qu’une enquête publique. Ce serait risible, monsieur le ministre, si l’ingérence de Pékin n’était pas si sérieuse.

Le gouvernement Trudeau ne se soucie pas suffisamment du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement pour pourvoir rapidement les postes qui y sont vacants — même si vous avez partiellement répondu à ma question — et pour inclure un sénateur de l’opposition officielle ou prendre des mesures à la suite du rapport du comité et des recommandations qui y figurent.

Je ne peux que conclure que vous et le premier ministre cherchez désespérément à cacher quelque chose. De quoi s’agit-il, monsieur le ministre?

M. Mendicino : Merci, madame la Présidente. Je tiens d’abord à souligner que le gouvernement prend la menace de l’ingérence étrangère très au sérieux. C’est pourquoi le gouvernement a présenté le projet de loi C-59, qui accorde au Service canadien du renseignement de sécurité des pouvoirs supplémentaires de réduction des menaces. Cela dit, en accordant ces nouveaux pouvoirs, nous étions aussi conscients que, pour rallier les Canadiens, nous devions relever la barre en matière de transparence.

La création du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement est l’un des moyens que nous avons pris pour y arriver. Nous avons également créé l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, qui est actuellement présidé par une ancienne juge de la Cour suprême du Canada, la juge Marie Deschamps.

Ces deux initiatives témoignent du sérieux avec lequel nous envisageons le risque que pose l’ingérence étrangère pour notre sécurité nationale. Je peux assurer au sénateur et à vous tous que la voie à suivre passe par la mobilisation des Canadiens, et nous sommes convaincus que le processus d’audiences publiques proposé par M. Johnston contribuera à l’atteinte de cet objectif.

L’ingérence étrangère

L’honorable Leo Housakos : Monsieur le ministre, nous voilà de nouveau exactement là où nous étions il y a un an, lorsque je vous ai interrogé au sujet de mon projet de loi concernant un registre d’agents étrangers. Vous avez dit que c’était une bonne idée, mais, de toute évidence, vous avez remis la chose à plus tard. J’ai l’impression, monsieur le ministre, que nous serons de nouveau ici dans un an, encore à différer, puisque vous vous êtes engagé à présenter le projet de loi seulement à l’automne.

Il y a quelques mois, vous avez affirmé que la GRC avait fermé les postes de police illégaux de la République populaire de Chine au Canada. En fait, deux postes demeurent ouverts à Montréal, et nous savons qu’ils ont reçu du financement de votre propre gouvernement. Pourquoi nous a-t-on fait croire que ces postes avaient été fermés? La GRC vous a-t-elle menti, monsieur le ministre, ou avez-vous déformé la vérité? Est-ce la GRC ou vous qui faites preuve d’incompétence?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Merci, monsieur le sénateur. Je suis heureux de vous revoir dans cette enceinte. Je me souviens bien de mon témoignage d’il y a un an. Je suis plus optimiste que vous quant aux progrès que nous avons réalisés dans la création d’un registre des agents étrangers.

Comme vous avez pu le constater, nous avons mené de vastes consultations publiques sur la meilleure façon de créer ce nouvel instrument juridique afin de promouvoir la transparence sur ce qui constitue de l’activité diplomatique légitime tout en dissuadant et en débusquant les activités étrangères qui dépassent les conventions de la diplomatie légitime et peuvent ainsi devenir de l’ingérence étrangère.

J’espère sincèrement que nous parviendrons, dans la foulée des consultations au cours desquelles j’ai constaté un fort consensus sur la nécessité de créer ce projet de loi, à rédiger celui-ci d’une manière qui est conforme aux principes de la Charte et qui correspond aux préoccupations exprimées par les membres des diasporas qui sont la cible d’ingérences étrangères.

Pour en revenir à notre premier échange, monsieur le sénateur, je pense que nous avons fait des progrès majeurs et que l’année prochaine, à la même période, nous aurons mis en place un registre.

La radiation des casiers judiciaires

L’honorable Kim Pate : Bienvenue, monsieur le ministre. Récemment, vous avez indiqué — et c’est tout à votre honneur — que vous demeurez en faveur de la radiation automatique des casiers judiciaires et que vous souhaitez la mise en œuvre d’un système à cet effet.

Pouvez-vous nous faire un bilan de la progression de vos travaux à l’égard du retrait automatisé de casiers judiciaires? En premier lieu, j’aimerais plus précisément en savoir davantage sur les injustices historiques, par exemple la sollicitation, qui touche les femmes de manière disproportionnée et qui n’apparaît pas sur la liste actuelle des condamnations historiques. En second lieu, j’aimerais obtenir plus de détails à propos des liens entre les casiers judiciaires et la surreprésentation continue dans nos systèmes pénal, judiciaire et pénitentiaire des personnes démunies, atteintes d’un trouble mental invalidant ou racisées — surtout les femmes autochtones, qui représentent maintenant 50 % de la population carcérale fédérale et qui, dans bien des cas, s’y sont retrouvées à la suite d’une infraction violente parce qu’elles étaient la plupart du temps elles-mêmes victimes de violence.

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Sénatrice Pate, j’aimerais d’abord vous remercier non seulement de vos efforts de défense des droits, mais aussi de votre collaboration dans cet important dossier. Je crois que cette discussion porte d’abord sur le fait que les Canadiens des communautés racisées et autochtones sont touchés de façon démesurée par les interventions des institutions chargées de l’application de la loi, y compris les services correctionnels, qui relèvent du gouvernement fédéral. C’est pourquoi il devrait y avoir un processus pour que ces gens puissent être pleinement réintégrés dans la collectivité après avoir purgé leur peine. Le régime de pardon fait partie des moyens à notre disposition pour atteindre cet objectif.

Comme vous devez le savoir, j’ai considérablement réduit les frais, qui étaient d’environ 600 $, et qui sont maintenant de 50 $, ce qui représente une réduction considérable du fardeau financier. Je reconnais que nous pouvons en faire plus, et nous le ferons.

Deuxièmement, nous aidons les gens qui font une demande de pardon à s’y retrouver dans le système afin qu’il y ait le moins de difficultés et d’obstacles possible pendant le processus.

(1430)

Je dois dire que je suis parfaitement au courant du projet de loi d’initiative parlementaire que vous marrainez. Vous et moi avons eu des conversations productives. Je pense qu’il y a un large consensus sur ce que nous essayons de réaliser, mais nous devons passer aux étapes suivantes.

Pour terminer, sénatrice Pate, je dirais que, comme vous le savez, grâce au travail du NPD dans le cadre du projet de loi C-5 de mon collègue le ministre Lametti, un projet de loi qui a contribué à réformer l’abrogation des peines minimales obligatoires, nous avons pu mettre en place un régime de séquestration automatique, bien que pour un petit sous-ensemble d’infractions liées aux stupéfiants.

[Français]

Les services de police autochtones

L’honorable Renée Dupuis : Bienvenue, monsieur le ministre. Depuis maintenant des décennies, plusieurs Premières Nations ont interpellé le gouvernement fédéral afin d’obtenir des services de police et de sécurité civile qui sont adéquats.

Par exemple, je pense à la Première Nation James Smith, en Saskatchewan, où ont eu lieu des événements tragiques qui ont mené à la mort de membres de la communauté, qui a interpellé le gouvernement pour assurer la mise en place de services locaux de police.

Je pense aussi à des actions en justice qui ont été intentées, dont celle de la Première Nation de Mashteuiatsh, au Québec, contre le gouvernement fédéral, qui s’est conclue par une décision du Tribunal canadien des droits de la personne confirmant que le sous‑financement des services constitue de la discrimination.

Dans le cadre du plan ministériel 2023-2024, un plan conjoint que vous avez déposé avec le ministre de la Protection civile, vous indiquez que la promotion d’approches de sécurité publique dirigées par des Autochtones demeure une priorité absolue.

Monsieur le ministre, quel est votre plan d’action et selon quelles échéances votre ministère planifie-t-il d’éliminer cette discrimination chez les Premières Nations afin de mettre en place des services pour relever de l’autorité de chaque Première Nation?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Merci pour la question, madame la sénatrice.

Le chemin de la réconciliation est plein de défis. Nous avons un plan fondé sur des relations avec les communautés autochtones qui est fondé sur la bonne foi. Donc, selon moi, il faut poursuivre avec un plan d’engagement qui se traduirait par des initiatives concrètes.

Je peux fournir quelques exemples, dont l’Initiative en matière de planification de la sécurité des collectivités autochtones, ainsi que le comité de la nation crie James Smith au Nunavut et la nation Siksika, qui est une Première Nation d’Alberta où nous avons déjà annoncé la réouverture d’un service de police autochtone. Il existe donc des précédents sur lesquels nous pouvons nous appuyer pour de futures initiatives.

Le gouvernement a aussi l’intention de créer un nouveau projet de loi afin de reconnaître que les services policiers autochtones sont un service essentiel comme pour toutes les autres communautés non autochtones. À ce sujet, je travaille avec les leaders autochtones.

La violence par les armes à feu

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Au cours des six derniers mois, neuf policiers ont été tués en devoir au Canada. La nature ou le contenu de votre projet de loi C-21 n’aurait sûrement pu empêcher aucun de ces meurtres. La violence qui est responsable des nombreux règlements de compte au pays n’a rien à voir avec les restrictions de votre projet de loi; ce sont des criminels qui utilisent des armes non enregistrées pour tuer.

Lorsque la violence n’est pas liée au crime organisé, ce sont des gens qui souffrent de maladie mentale, et qui sont en liberté plutôt que de se trouver en institution, qui commettent ces meurtres.

Si vous prenez le temps, comme moi, d’examiner l’origine de la violence, ne trouvez-vous pas décourageant de voir le temps passé par les fonctionnaires à essayer de classifier des armes plutôt que de chercher des solutions immédiates à cette violence? Je parle ici de solutions judiciaires, de solutions policières et de solutions médicales.

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Tout d’abord, je veux dire que je partage vos préoccupations. Oui, c’est une période vraiment difficile pour la communauté des services policiers. J’ai assisté à toutes les funérailles de ceux qui ont perdu la vie alors qu’ils étaient en devoir.

Je suis vraiment touché par leur sacrifice; c’est ma motivation et celle du gouvernement. Selon moi, la seule façon dont on peut réduire la situation de la violence causée par les armes, c’est à l’aide d’un plan exhaustif qui inclut trois piliers. Le premier consiste en des frontières fortes; nous avons déjà investi 450 millions de dollars. Le deuxième consiste en une stratégie de prévention; nous sommes à investir 250 millions de dollars pour établir les services des communautés afin de traiter des déterminants sociaux. Finalement, le troisième consiste en des lois fortes, comme le projet de loi C-21, qui facilitera la mise en place d’une bannière nationale pour les armes d’assaut.

J’espère que vous et tous les sénateurs saurez tirer parti d’un breffage technique qui aura lieu demain à ce sujet.

[Traduction]

L’ingérence étrangère

L’honorable Andrew Cardozo : Merci, monsieur le ministre. Bienvenue au Sénat. Merci d’être ici pour répondre à nos questions.

Ma question porte sur l’ingérence étrangère. Je veux proposer une troisième option. En effet, deux options sont discutées publiquement : l’enquête publique et, bien entendu, le processus suggéré par M. Johnston. Selon moi, les deux ont leurs pour et leurs contre, et votre Chambre semble assurément dans une impasse.

J’aimerais suggérer une option qui combinerait les deux, c’est‑à‑dire qu’elle comprendrait une enquête publique menée par un juge, tout en prévoyant un rôle actif pour le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, qui examineraient les documents au début et à la fin du processus.

Par ailleurs, j’estime important que l’enquête porte sur l’ingérence sous toutes ses formes — politique, économique ou sociale — et de la part de tous les pays. Le problème existe depuis un bon moment. Envisageriez-vous une telle option à ce stade-ci?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Merci beaucoup, sénateur, il s’agit d’une excellente question. J’aimerais commencer par souligner que l’ingérence étrangère a des répercussions sur tous les aspects de la société, de l’économie aux institutions démocratiques — pensons par exemple à ce que nous ont révélé certains reportages extrêmement troublants au sujet de parlementaires — en passant par la population elle-même. La façon dont la répression transnationale empêche certaines personnes de participer pleinement à la vie de leur communauté est l’une des principales raisons pour lesquelles nous avons créé tous ces nouveaux pouvoirs et mécanismes de transparence.

J’aimerais d’ailleurs prendre un instant pour parler de transparence. Le débat continue sur la meilleure voie à suivre et, à mon avis, si je me fie aux conversations que j’ai eues avec des Canadiens, il faut que les intérêts de nos concitoyens soient au cœur de cet exercice. Selon moi, c’est en organisant des audiences publiques qui permettront aux Canadiens de participer directement au processus et de se prononcer sur les outils dont nous avons besoin pour nous prémunir contre l’ingérence étrangère que nous réussirons à freiner, voire à contrer, ce phénomène et à rétablir la confiance des Canadiens dans leurs institutions.

L’honorable Denise Batters : Monsieur le ministre, quels que soient les moyens employés par le gouvernement pour mettre fin à ce scandale sur l’ingérence de Pékin, nous en revenons toujours à la fondation Trudeau. Le premier ministre a chargé Morris Rosenberg de faire rapport sur l’ingérence étrangère dans le processus électoral. Or, ce monsieur était le PDG de la fondation Trudeau à l’époque du fameux don de Pékin. Quelle a été la conclusion de M. Rosenberg? Selon lui, il n’y a pas de problème.

La fondation Trudeau n’est pas mentionnée une seule fois dans le rapport de 55 pages du rapporteur spécial, M. David Johnston. Ce dernier, lui-même membre de la fondation Trudeau, a décidé d’offrir davantage de services à titre de rapporteur spécial plutôt que de recommander la tenue d’une enquête publique comme le réclament les Canadiens. Pour parer aux questions concernant ses liens étroits avec le premier ministre Trudeau, M. Johnston a demandé un avis juridique indépendant d’un autre ancien de la fondation Trudeau, en l’occurrence Frank Iacobucci. Et qu’en est-il des deux comités de sécurité chargés de se pencher sur ce scandale? L’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement compte deux anciens de la fondation Trudeau, dont son président. Par surcroît, le seul sénateur qui siège au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement est également un ancien de la fondation Trudeau.

Compte tenu de ces antécédents, pourquoi les Canadiens devraient-ils croire qu’ils obtiendront les réponses qu’ils méritent au sujet de ce choquant scandale d’ingérence?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Les Canadiens peuvent s’attendre à obtenir les réponses qu’ils méritent en ce qui concerne l’ingérence étrangère parce que c’est l’actuel gouvernement qui a créé le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement. C’est également notre gouvernement qui a chargé un rapporteur spécial de faire la lumière sur la façon dont le gouvernement traite l’ingérence étrangère et la combat.

Ce qui m’ennuie avec la position du Parti conservateur du Canada dans ce dossier, c’est que le gouvernement a offert à maintes reprises au chef du Parti conservateur du Canada, M. Pierre Poilievre, la possibilité d’assister à une séance d’information au plus haut niveau de sécurité, mais que, jusqu’ici, celui-ci a refusé cette offre. Nous lui suggérons d’accepter cette offre qui lui permettrait d’obtenir les renseignements utiles pour discuter de façon réfléchie de moyens de lutter contre l’ingérence étrangère.

[Français]

La réglementation sur le cannabis

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le ministre, en 2018, vous avez légalisé la consommation de cannabis et il est ensuite arrivé à peu près tout ce qu’on vous avait dit qu’il allait arriver, c’est-à-dire que le marché noir allait continuer, qu’il allait concurrencer le réseau de distribution légal et que la consommation chez les jeunes allait augmenter.

(1440)

Des études montrent que le tiers des Canadiens interrogés ayant consommé du cannabis durant la dernière année dit avoir pris le volant sous l’influence de la drogue. On a vu 541 enfants hospitalisés à travers le pays pour intoxication au cannabis entre janvier et septembre 2021. Ce sont tous des incidents dont on vous avait prévenu.

Le Bureau de la concurrence Canada veut maintenant stimuler la consommation, favoriser l’innovation et demander que les limites de THC soient augmentées.

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Madame la Présidente, je partage les préoccupations de l’honorable sénateur sur la question des défis des individus face aux enjeux de santé mentale et d’abus de substances, qui comprennent des drogues.

Dans le contexte de l’approche du gouvernement fédéral, le travail que fait Carolyn Bennett, ministre de la Santé mentale et des Dépendances met l’accent sur les services publics et de santé mentale pour aider ceux qui ont besoin d’aide.

[Traduction]

Le Service à la famille chinoise du Grand Montréal

L’honorable Yuen Pau Woo : Bonjour, monsieur le ministre. Les fameux postes de police montréalais que le sénateur Housakos a calomniés sont en fait le Service à la famille chinoise du Grand Montréal, un organisme qui offre des services communautaires aux Montréalais d’origine chinoise depuis près de 50 ans. Vous avez dit que le prétendu poste de police du centre a été fermé, mais vous n’avez fourni aucune information sur le moment et la nature de ses activités, sur le caractère répréhensible de ces activités, sur les personnes impliquées et, plus important encore, sur la manière dont le service pourra reconnaître ce genre d’activités afin qu’elles ne se reproduisent pas. Monsieur le ministre, quand rétablirez-vous la réputation du Service à la famille chinoise du Grand Montréal afin qu’il puisse continuer à accomplir l’excellent travail qu’il effectue depuis près de 50 ans?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je vous remercie de cette question, sénateur. J’aimerais d’abord et avant tout souligner — et j’espère qu’il s’agit d’un sentiment que nous partageons tous — qu’il faut exiger des comptes pour toute ingérence étrangère et la condamner, car elle va à l’encontre de l’intérêt national du Canada. Le gouvernement a mis en place les outils nécessaires pour s’occuper de ce fléau qui est de plus en plus envahissant et complexe.

En tant que ministre de la Sécurité publique, mon travail consiste à défendre les nouveaux outils que préconise le Centre de la sécurité des télécommunications et à assurer la participation des Canadiens qui peuvent être marginalisés ou victimes de stéréotypes, car ce sont parfois eux qui sont la cible de l’ingérence étrangère. Tout comme je l’ai déjà dit par le passé, je vous assure que nous allons continuer à avoir des discussions à ce sujet.

En ce qui concerne les prétendus postes de police et les activités d’ingérence étrangère qui ont été signalées à leur sujet, comme vous le savez, la GRC a déclaré avoir déjà interrompu ce genre d’activité dans le passé. Il faudrait adresser toute question concernant des enquêtes en cours à la GRC, car elle travaille de façon indépendante du gouvernement, conformément aux principes constitutionnels établis.

La législation sur les armes à feu

L’honorable Pat Duncan : Merci d’être ici aujourd’hui, monsieur le ministre. En janvier, vous vous êtes rendu au Yukon pour rencontrer les Rangers canadiens, l’association des pêcheurs et des chasseurs de gibier du Yukon, les propriétaires d’armes à feu, le gouvernement autochtone et celui du Yukon. Vous vous êtes d’ailleurs rendu sur le terrain, où vous avez déclaré aux médias yukonnais que vous aviez vu que les armes à feu sont utilisées de manière sécuritaire et responsable, avant de conclure en disant que vous avez appris beaucoup de choses.

Monsieur le ministre, pourriez-vous me dire, à moi qui représente le Yukon, en quoi le projet de loi C-21 reflète ce que vous appris pendant ce voyage et ce que les Yukonnais vous ont dit?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je crois qu’il s’agit d’une des expériences les plus instructives et les plus enrichissantes qu’il m’a été donné de vivre à titre de ministre de la Sécurité publique, mais aussi en tant qu’habitant d’une grande ville comme Toronto. Une fois au Yukon, j’ai pu parcourir la piste terrestre qui relie Dawson à Whitehorse en compagnie de propriétaires d’armes à feu, pour qui il ne s’agit pas que d’un simple passe-temps, mais d’une partie intégrante de leur identité.

J’ai constaté de mes propres yeux que ces gens exercent ce passe‑temps de manière tout à fait sécuritaire, que ce soit pour chasser et piéger ou, dans le cas des Autochtones, pour se protéger contre les bêtes sauvages. Je leur ai assuré que le projet de loi C-21 ne s’en prend aucunement aux propriétaires d’armes à feu qui respectent la loi, contrairement à ce qu’affirme souvent le Parti conservateur, mais qu’il vise plutôt à débarrasser le pays des armes de type AR-15, qui ont servi — et qui pourraient encore servir — dans plusieurs tueries.

Comme vous le savez sans doute, la Commission des pertes massives de la Nouvelle-Écosse a demandé au gouvernement fédéral de resserrer les règles qui interdisent les armes à feu de type AR-15. C’est ce que nous avons fait, avec l’appui de trois des quatre grands partis reconnus à la Chambre des communes et en respectant le mode de vie des gens du Nord. C’est d’ailleurs la méthode que nous continuerons d’appliquer dans l’avenir.

[Français]

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Monsieur le ministre, je reviens sur le projet de loi C-21. Croyez-vous qu’il va empêcher les crimes commis par les gangs de rue à Vancouver, Toronto, ou Montréal, alors que le projet de loi va tout simplement nuire aux honnêtes citoyens qui prennent le temps d’enregistrer leurs armes à feu?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Oui, sénateur, je suis certain que lorsque le projet de loi entrera en vigueur, il sauvera des vies. Un gel national des armes de poing va prévenir d’autres tragédies causées par les fusillades. Les armes de poing sont le type d’arme à feu utilisé dans la grande majorité des homicides. Cela a été démonté dans les statistiques. Un gel national des armes de poing réduira la violence causée par les armes de poing.

De plus, il faut renforcer les ressources de l’Agence des services frontaliers du Canada à la frontière. Le gouvernement y travaille. Finalement, il faut également traiter le problème à partir de ses causes au moyen d’un plan de prévention, en partenariat avec les organismes locaux qui comprennent mieux que nous, dans cette enceinte, et mieux que n’importe quel parlementaire. Ce sont eux qui comprennent les risques sur le terrain. Grâce à cette initiative, nous pourrons prévenir des incidents de violence à l’avenir.

[Traduction]

Les services de police autochtones

L’honorable Marty Klyne : Monsieur le ministre, votre lettre de mandat vous demande de continuer à travailler avec les partenaires des Premières Nations afin d’élaborer conjointement un cadre législatif pour les services de police des Premières Nations, et de continuer à vous engager avec les Inuits et les Métis sur les questions de police.

Vous avez précédemment indiqué que vous espériez déposer un tel projet de loi à l’automne 2022. Cependant, le mois dernier, la Presse canadienne a fait état d’incertitudes quant au moment où le gouvernement déposera un projet de loi sur les services de police des Premières Nations cette année, s’il le fait, y compris pour reconnaître les services de police des Premières Nations comme des services essentiels. Je souligne qu’il y avait dans le budget de 2021 des engagements financiers importants visant le processus d’élaboration conjointe. Monsieur le ministre, quand les Canadiens peuvent-ils s’attendre à voir le projet de loi en question présenté?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur. Il faut le faire le plus rapidement possible, mais de la bonne manière. C’est la leçon que nous devons tirer de la réconciliation. Je peux vous assurer que nous travaillons sans relâche avec les dirigeants autochtones, notamment les chefs régionaux Teegee et Picard, qui siègent tous deux au groupe de travail mixte sur les services de police autochtones de l’Assemblée des Premières Nations, mais également avec les détenteurs de droits et de titres directement dans leurs communautés, pour nous assurer que la mesure législative que nous élaborons respecte les principes de codéveloppement.

Entretemps, nous avons affecté un montant inégalé, soit 860 millions de dollars, au Programme des services de police des Premières Nations et des Inuits, que nous mettons en œuvre à un rythme accéléré. Cela se traduit par des progrès concrets, comme en témoignent les annonces que nous avons faites avec la nation Siksika, avec la nation crie James Smith, et au Nunavut, ainsi que les travaux que nous réalisons sur les territoires mohawks, notamment à Akwesasne, où nous avons annoncé, la semaine dernière, un nouveau montant global de 12,1 millions de dollars, en partenariat avec le chef Abram Benedict. Voilà la preuve que nous faisons des progrès, mais nous devons encore travailler sur la mesure législative, et nous avons bien l’intention de le faire.

(1450)

[Français]

La Charte canadienne des droits des victimes

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Monsieur le ministre, lors de votre comparution au Sénat le 30 mars 2022, vous vous souviendrez sans doute que vous aviez répondu à ma question en affirmant que la GRC n’était pas au-dessus de la Charte canadienne des droits des victimes.

Rappelons que ma question concernait l’histoire de Francesca Savoie, une jeune fille de 17 ans qui a tragiquement perdu la vie en 2007, lorsque son véhicule a été happé de plein fouet par un chauffard ivre, alors que ce dernier était poursuivi par un véhicule de la GRC. La famille de Francesca attend depuis 16 ans que la GRC l’informe sur les circonstances de l’accident qui a coûté la vie à leur fille unique.

De plus, je vous ai envoyé deux lettres à ce sujet, soit le 13 avril 2022 et le 8 mai 2023, sans recevoir de réponse de votre part ni d’accusé de réception. Monsieur le ministre, pourquoi n’avez-vous pas répondu à mes deux lettres et à l’appel de la famille Savoie, qui nous écoute actuellement?

Ferez-vous votre devoir de ministre et rencontrerez-vous les parents de Francesca Savoie, afin que leur droit à l’information, qui est inscrit dans la Charte canadienne des droits des victimes, soit respecté par la GRC?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : D’abord, j’aimerais dire que toutes mes pensées accompagnent la famille Savoie. Chaque fois qu’une famille perd un être cher, c’est une douleur sans nom et injuste, même s’il existe un processus qui est basé sur la bonne foi et sur les valeurs de la Charte canadienne des droits des victimes.

Je souscris à vos propos, sénateur Boisvenu, et je vais continuer de croire que la GRC n’est pas au-dessus des principes de la Charte canadienne des droits des victimes. Je serai toujours prêt à travailler avec tous les Canadiens, y compris les familles des victimes et la famille Savoie, et à leur offrir mon soutien lors de ces moments douloureux.

[Traduction]

L’extrémisme de droite

L’honorable Ratna Omidvar : Merci, monsieur le ministre, d’être parmi nous aujourd’hui. Je voudrais vous interroger sur la montée des mouvements d’extrême droite au Canada. On a pu observer certains de ces débordements s’opérer en temps réel lorsque des membres du « Convoi de la liberté » ont terrorisé les habitants d’Ottawa pendant trois semaines. Que fait le gouvernement pour suivre ce phénomène? Plus précisément, surveillez-vous la manière dont ces extrémistes influencent les politiciens au Canada? Les agences de renseignement informent‑elles les parlementaires ciblés par les mouvements d’extrême droite? Je sais que l’on parle de l’ingérence étrangère, mais qu’en est-il de l’ingérence nationale?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je tiens à vous remercier, madame la sénatrice, pour cette question. Comme vous, je suis profondément préoccupé par la montée de l’extrémisme de droite, qui constitue un mouvement et un phénomène fondés sur des motivations idéologiques extrêmes. Nous l’avons constaté sous différentes formes, notamment lors des blocages illégaux qui ont eu lieu il y a un peu plus d’un an.

Pour être clairs, nous parlons ici d’un tout petit groupe d’individus endurcis qui ont participé à cette opération et — pour reprendre les termes utilisés publiquement par la cellule de Coutts — qui se disaient prêts à « tomber » pour leur cause. Nous devons tous être très lucides sur la nature de cette menace.

Parallèlement, le gouvernement a pris des mesures concrètes en dressant la liste d’entités telles que les Proud Boys, un groupe notoire de suprémacistes blancs basé en grande partie aux États‑Unis. Nous devons continuer à être vigilants et à donner les outils nécessaires à nos institutions pour qu’elles puissent analyser les renseignements, mais aussi pour qu’elles le fassent de la bonne manière. Voilà ce que nous faisons en matière de responsabilité et d’application de la loi.

Par ailleurs, le gouvernement doit consulter les Canadiens pour examiner les causes profondes de ces mouvements et y répondre par des stratégies de dialogue concernant la désinformation, afin de réduire les risques à mesure que nous avançons. C’est le travail que nous faisons avec le G7, le Groupe des cinq et d’autres.

Son Honneur la Présidente : Je vous remercie, monsieur le ministre.

[Français]

Les services de police autochtones

L’honorable Michèle Audette : Monsieur le ministre, j’ai deux questions à poser au sujet de la collaboration avec les leaders autochtones. Le projet de loi répond notamment à un appel à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et filles autochtones disparues et assassinées. Est-ce que parmi les leaders autochtones participant à l’élaboration de la loi, il y a aussi des groupes de femmes autochtones qui habitent dans les communautés, qui auraient des initiatives à proposer ou des messages importants à transmettre, sachant que nos communautés sont en crise — y compris la mienne, Uashat mak Mani-Utenam?

Avec les phénomènes croissants du trafic de stupéfiants et de la violence, les policiers sont essoufflés. Avez-vous des solutions à proposer dans l’immédiat?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je vous remercie de votre question. Mon message est simple. Nous allons continuer de travailler en collaboration avec les communautés autochtones. C’est la raison pour laquelle je me suis rendu à Akwesasne il y a quelques semaines pour annoncer une initiative de 12,1 millions de dollars visant à améliorer la capacité des services policiers autochtones dans les communautés mohawks et à renforcer la collaboration avec les autres services policiers au Canada et aux États-Unis. Cette initiative vise également à aider les organismes locaux en se fondant sur les traditions, l’histoire, la culture et les valeurs autochtones.

Il s’agit d’une marque de respect à l’égard du principe de réconciliation et d’une façon de mieux protéger nos communautés autochtones.

[Traduction]

Le Service canadien du renseignement de sécurité

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le ministre, le Globe and Mail a écrit dernièrement qu’avant d’être rétrogradé au sein du Cabinet, votre prédécesseur, le ministre Bill Blair, a attendu quatre mois avant d’accorder un mandat de surveillance au SCRS. Selon le quotidien, ce mandat était lié à l’ingérence étrangère qui a lieu au Canada, et cet épisode se serait produit dans les mois précédant les élections fédérales de 2021.

Monsieur le ministre, combien de temps vous faut-il, en moyenne, pour approuver les demandes de mandat du SCRS? Combien de temps vous a-t-il fallu la fois qui vous en a pris le plus? Avez-vous déjà attendu quatre mois avant d’approuver une demande de mandat du SCRS?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Pour répondre à votre question, il faut bien comprendre l’importance des responsabilités qui m’incombent, à titre de ministre de la Sécurité publique, lorsque je dois autoriser les mandats demandés par le SCRS. Ces mandats figurent parmi les outils de surveillance les plus puissants dont dispose le SCRS pour assurer la sécurité du pays. C’est donc dire à quel point je dois, en tant que ministre, étudier attentivement ces demandes afin d’être certain qu’elles sont en tous points conformes à la loi. C’est ainsi qu’on réussit à concilier la lutte contre les menaces qui pèsent sur la sécurité nationale et le respect des valeurs de la Charte, car les citoyens que nous sommes peuvent alors continuer de jouir pleinement de leurs droits.

Oui, il s’agit d’une tâche urgente, mais ce n’est pas non plus le genre de chose qu’on autorise les yeux fermés. Il s’agit d’une des plus grandes responsabilités associées à mes fonctions.

[Français]

La résilience des forêts face aux feux

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Monsieur le ministre, merci d’être avec nous aujourd’hui. Ma question porte sur la sécurité des communautés. Dans votre lettre de mandat du 21 décembre 2021, on vous demandait, et je cite :

d’assurer la sécurité de nos communautés et d’accroître la résilience des forêts face aux incendies, notamment en formant 1 000 nouveaux pompiers communautaires et en investissant dans de l’équipement pour contrer les feux.

Combien de nouveaux pompiers avez-vous déjà formés, et quels sont les nouveaux équipements qui ont été acquis? Comme on le sait, le Canada fabrique d’excellents avions-citernes.

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je vous remercie de votre question. C’est un sujet vraiment important et essentiel, particulièrement à cause des incendies qui font rage actuellement en Nouvelle-Écosse. Nos pensées accompagnent les Canadiens qui se trouvent en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.

Dans le budget de 2022, le gouvernement fédéral a investi 516 millions de dollars dans la formation de 1 000 nouveaux pompiers. C’est le reflet de notre dévouement en vue de renforcer la capacité des pompiers à combattre les incendies. Enfin, j’aimerais ajouter que, avec les changements climatiques, il y a un risque accru d’incendies qu’il faut gérer par l’intermédiaire d’investissements supplémentaires destinés aux pompiers.

(1500)

[Traduction]

Le nombre disproportionné d’Autochtones incarcérés

L’honorable Brian Francis : Bienvenue, monsieur le ministre.

Selon un rapport présenté par l’enquêteur correctionnel du Canada en novembre 2022, le gouvernement fédéral a fait peu de progrès dans le dossier de la surreprésentation des Autochtones dans les 10 dernières années; pour certains, les conditions sont encore pires aujourd’hui. Le rapport souligne également que les pavillons de ressourcement, qui contribuent à la réadaptation et à la réinsertion sociale, reçoivent toujours un financement insuffisant et qu’ils continuent d’être sous-utilisés dans l’ensemble du pays. Dans le Canada atlantique, par exemple, il n’y a toujours aucun lit disponible dans les pavillons de ressourcement, et ce, même si la population autochtone incarcérée y a augmenté de près de 90 % dans les 10 dernières années.

A-t-on observé un quelconque recul du nombre d’Autochtones incarcérés, particulièrement de femmes, l’an dernier? Quels sont les taux d’occupation actuels dans les 10 pavillons de ressourcement financés ou gérés par le Service correctionnel du Canada? Prévoit‑on construire des pavillons de ressourcement dirigés par des Autochtones dans le Canada atlantique ou ailleurs? Dans l’affirmative, à quel endroit et à quel moment?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je vous remercie de la question, sénateur. Avant d’y répondre, j’aimerais dire que nous allons obtenir les chiffres exacts et vous les fournir ainsi qu’à vos collègues du Sénat.

En réponse à la surreprésentation chronique des Autochtones chez les personnes prises en charge par les institutions chargées de l’application de la loi dans l’ensemble du pays, nous devons prendre des mesures très concrètes. Premièrement, nous devons évidemment veiller à ce que les membres de tous les services de police reçoivent une formation adaptée à la culture qui tient compte des traditions, de la culture et de l’histoire des Autochtones.

Deuxièmement, nous devons veiller à ce que les communautés autochtones soient habilitées à mener des initiatives en matière de sécurité publique. Je pense que j’ai déjà fourni des exemples très concrets de la façon dont nous nous y employons. D’ailleurs, sénateur, il n’y a pas très longtemps, j’ai eu des échanges très positifs et constructifs à Eskasoni, une collectivité que vous connaissez sûrement très bien.

Troisièmement, nous devons surtout veiller à établir une relation fondée sur la confiance et le respect. On ne peut pas prendre de raccourcis. Cela exige que nous ayons des échanges directs et que nous offrions aux peuples et aux communautés autochtones les conditions nécessaires pour qu’ils puissent apporter eux-mêmes ces réformes et ces changements. C’est exactement le travail que je m’engage à faire.

Les peines minimales obligatoires

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le ministre, la criminalité a atteint un niveau record à Winnipeg, comme partout au pays. Il y a eu, à Winnipeg, un nombre record de 53 homicides en 2022, dont 30 % ont été commis avec une arme à feu.

Dans le projet de loi C-5, le gouvernement Trudeau a supprimé huit peines minimales obligatoires impliquant l’utilisation d’une arme à feu dans le cadre d’un crime, notamment les vols qualifiés commis avec une arme à feu, l’extorsion avec une arme à feu, la décharge d’une arme à feu avec une intention particulière, l’utilisation d’une arme à feu lors de la perpétration d’un crime ainsi que quatre autres.

Vous semblez croire que la solution consiste à créer davantage de lois sur les armes à feu.

Monsieur le ministre, en quoi la suppression par le gouvernement Trudeau des peines obligatoires liées à l’utilisation d’armes à feu a‑t‑elle contribué à lutter contre la hausse des crimes violents?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Comme le sénateur le sait, le projet de loi C-5 était une réponse directe à plusieurs décisions de la Cour suprême du Canada qui avaient systématiquement invalidé les peines minimales obligatoires, lesquelles privaient le pouvoir judiciaire de son indépendance et allaient trop loin en enfreignant la Charte. À l’inverse, le gouvernement a cherché à mettre en place d’importantes lois sur le contrôle des armes à feu, comme le projet de loi C-21, qui réduira la violence armée parce qu’il renforce l’interdiction des armes à feu de type AR-15 et met en place un gel national des armes de poing. Ce sont des initiatives que le Parti conservateur s’est engagé à abroger, ce qui aurait pour conséquence de légaliser de nouveau ces armes qui n’ont aucun but récréatif légitime.

Je conclurai en disant que le Service de police de Winnipeg a reconnu que les investissements du gouvernement, y compris les 390 millions de dollars que j’ai récemment annoncés, l’aideront à faire son travail sur le terrain. C’est un travail que nous continuerons à faire en partenariat avec toutes les provinces, tous les territoires et toutes les municipalités, ainsi qu’avec les services de police de ces administrations.

L’avancement des travaux législatifs

L’honorable Paula Simons : Monsieur le ministre, à la même époque l’année dernière, vous vous souviendrez que nous avons été saisis du projet de loi S-7, Loi modifiant la Loi sur les douanes et la Loi sur le précontrôle de 2016. On nous a dit qu’il était essentiel d’adopter le projet de loi le plus rapidement possible ici, parce qu’un tribunal albertain avait déclaré certaines dispositions de la loi inconstitutionnelles. Ce jugement entraînait des incohérences, car la loi était appliquée différemment en Alberta — et, par la suite, en Ontario — par rapport à ailleurs au pays.

On nous avait encouragés à ne pas modifier la loi, mais nous l’avons fait tout de même, et ce, avant la fin de juin. Je ne peux pas m’empêcher de signaler que le projet de loi S-7 a été présenté en première lecture en octobre dernier et n’a pas avancé d’un iota sur votre Feuilleton.

Par curiosité, pourquoi fallait-il se précipiter, et que se passe-t-il dans votre enceinte?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Premièrement, nous étudions le projet de loi C-21, une mesure législative qui permettra de sauver des vies; le projet de loi C-20, mesure au sujet de laquelle je viens de témoigner devant le Comité permanent de la sécurité publique, qui vise à établir une nouvelle commission d’examen et de traitement des plaintes du public relatives à la GRC, et qui améliorerait l’examen indépendant et la surveillance de la GRC et de l’Agence des services frontaliers du Canada, ce qui serait une première dans le cas de cette agence. Nous avons également présenté le projet de loi C-26 qui vise à accroître la sécurité de notre réseau de cyberinfrastructure essentielle. Compte tenu de tous les échanges que j’ai eus concernant l’ingérence étrangère et d’autres menaces à la sécurité nationale, je suis persuadé que les sénateurs reconnaissent également le bien-fondé de cette initiative.

Par ailleurs, je tiens à prendre un instant pour vous remercier madame la sénatrice ainsi que vos collègues qui ont participé à l’étude de cette mesure législative. Soyez assurés que je suis déterminé à la faire adopter aussi, et que j’ai examiné attentivement la façon dont le projet de loi a été renvoyé à la Chambre des communes.

Les répercussions de l’intelligence artificielle

L’honorable Andrew Cardozo : Monsieur le ministre, j’ai une autre question à vous poser. Elle porte sur l’enjeu plus vaste de l’intelligence artificielle.

Vous savez sans doute que, hier, pour la deuxième fois en quelques semaines, un groupe d’experts et de personnalités de premier plan a publié une brève déclaration. Je la cite :

Atténuer le risque d’extinction lié à l’intelligence artificielle devrait être une priorité mondiale au même titre que d’autres risques à l’échelle de la société, tels que les pandémies et la guerre nucléaire.

C’est évidemment un enjeu qui concerne votre ministère sur le plan de l’ordre public, ainsi que l’ensemble du gouvernement.

Que pensez-vous de ce qui se passe dans le domaine de l’intelligence artificielle? Quelles préoccupations devrions-nous avoir à cet égard? On semble avoir perdu le contrôle de la situation, et les propriétaires et les concepteurs réclament l’intervention et l’aide du gouvernement. Qu’en pensez-vous?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Avec les changements climatiques et d’autres phénomènes mondiaux, la question soulevée par le sénateur est peut-être celle qui donne le plus matière à réflexion.

C’est une question dont je suis saisi, tout comme le gouvernement du Canada. Je pense que nous devons nous assurer que le Canada devient le pays le plus sûr et libre au monde, un endroit où les gens peuvent vivre leur vie dans l’espace numérique et virtuel. De toute évidence, cela a un rapport avec l’intelligence artificielle.

Il est important que nous ayons une discussion sur la façon dont le gouvernement travaillera avec les innovateurs dans ce domaine, car ce travail est quelque chose de crucial. D’importantes questions juridiques se posent, ainsi que des questions éthiques. De plus, il y a des questions pratiques à propos des répercussions de l’intelligence artificielle sur les emplois et l’économie. Nous devons unir nos efforts pour que le Canada soit au premier plan de ce débat parce que nous avons la main-d’œuvre la plus talentueuse au monde. Nous pouvons jouer un rôle déterminant dans ces discussions, et c’est ce que nous ferons.

L’ingérence étrangère

L’honorable Leo Housakos : Monsieur le ministre, on voit tout de suite que, vous et moi, on ne mesure pas de la même façon le progrès réalisé dans la lutte contre l’ingérence étrangère. La vérité, c’est que le Sénat — qui est par ailleurs rempli de personnes nommées par votre gouvernement — est actuellement saisi d’une mesure législative. Vous savez que s’il y avait une réelle volonté politique pour qu’elle soit renvoyée à un comité, étudiée, amendée et renvoyée à la Chambre, cela se ferait dans le temps de le dire.

Il s’agit d’un autre exemple de l’incurie du gouvernement dans le dossier de l’ingérence étrangère.

J’aimerais vous poser deux questions toutes simples afin d’illustrer à quel point le gouvernement traîne la patte. Quand les postes de police illégaux contrôlés par Pékin qui se trouvent en sol canadien — ce qu’a confirmé la GRC — seront-ils fermés? À quelle date le pays aura-t-il son registre des agents étrangers? Avant la fin de 2023, j’espère.

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Vous savez comme moi que c’est à la GRC que les questions qui portent sur l’ingérence étrangère devraient être posées, sénateur, qu’il s’agisse des pseudo-postes de police dirigés depuis Pékin ou de toute autre manifestation de cette même ingérence. Je vous dirais ceci : le budget de 2023 prévoit 49 millions de dollars pour aider la GRC à se doter de ressources additionnelles pour contribuer à protéger les collectivités contre cette problématique. Il serait bien que le Parti conservateur appuie le budget, mais ce n’est pas le cas.

(1510)

Ensuite, en ce qui concerne le registre — comme je l’ai déjà expliqué —, le gouvernement prend des mesures concrètes dans ce dossier et il adoptera la mesure législative en question dès que possible. Toutefois, nous devons veiller à obtenir l’appui des Canadiens, y compris les membres de la diaspora qui sont victimes de l’ingérence étrangère ou ciblés par des acteurs étrangers.

Je tiens aussi à préciser que le gouvernement fait des progrès pour concrétiser les réformes nécessaires pour combattre l’ingérence étrangère. Comme vous le savez, j’ai tout récemment émis une directive ministérielle pour m’assurer que les élus qui composent le gouvernement sont adéquatement informés. C’est une mesure que le gouvernement a mise en place, contrairement — je dois le souligner franchement — aux conservateurs la dernière fois qu’ils étaient au pouvoir. De plus, ces derniers n’avaient entrepris aucune des autres démarches que nous avons prises et que je viens de mentionner pour combattre l’ingérence étrangère.

[Français]

Le travail forcé et le travail des enfants

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Monsieur le ministre, comme vous le savez, le projet de loi S-211, qui vise à lutter contre le travail forcé et que j’ai marrainé, a récemment reçu la sanction royale. Je vous remercie d’ailleurs de l’avoir appuyé.

Depuis l’adoption de ce projet de loi, des entreprises et des citoyens ont communiqué avec moi, parce qu’ils avaient des questions précises à poser, par exemple : comment calcule-t-on les revenus totaux? La loi s’appliquera-t-elle aux fermes familiales?

Mon bureau a tenté de répondre le mieux possible à leurs questions, mais la réalité est que les réponses à ces questions sont désormais du ressort de votre ministère, qui est responsable de la réglementation et de la mise en œuvre de la loi d’ici le 1er janvier prochain.

Monsieur le ministre, votre ministère savait depuis longtemps que le projet de loi S-211 serait adopté. Prévoyez-vous de créer une page Web, une ligne téléphonique ou des documents explicatifs auxquels les entreprises pourront se référer pour répondre à leurs questions sur la loi?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je remercie l’honorable sénatrice de son leadership dans ce projet de loi et de sa collaboration.

La réponse courte est oui. Nous allons faire les investissements nécessaires pour assurer la mise en œuvre de ce projet de loi. Nous menons actuellement des discussions et nous irons de l’avant dès que possible.

La tuerie de Portapique—Le soutien aux familles des victimes

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Monsieur le ministre, à Truro, le 31 mars dernier, j’ai rencontré toutes les familles de Portapique dont un proche a été assassiné.

Il paraît que vous étiez là aussi. Pourquoi ni vous ni le premier ministre n’avez-vous pas rencontré les familles? Pourquoi ces familles, à ce jour, ont-elles dû absorber toutes les dépenses liées à l’assassinat de leurs proches? Votre gouvernement n’a offert aucune aide financière. Pourquoi n’avez-vous pas rencontré les familles, et pourquoi ne les aidez-vous pas financièrement?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Avec tout mon respect, monsieur le sénateur, je suis presque certain que je m’étais engagé directement auprès des familles de Portapique à Truro. Je pense que j’ai été l’un des premiers, parmi les ministres du gouvernement fédéral, à rencontrer les familles en personne pour leur exprimer mes condoléances. Je sais que c’est une période qui est extrêmement difficile pour ces familles.

J’étais présent pour soutenir les familles quand la Commission des pertes massives a publié son rapport final. C’est la raison pour laquelle j’ai annoncé, plus tôt aujourd’hui, la création d’un comité de suivi en qui j’ai toute confiance pour assurer la mise en œuvre des recommandations du rapport final. Nous avons nommé la juge à la retraite Linda Oland, une personne qui a beaucoup d’expérience dans le domaine judiciaire et une résidante de la Nouvelle-Écosse. Grâce à son leadership, et avec les autres intervenants, nous pourrons réaliser la vision de la Commission des pertes massives, parce que le temps est venu de réformer la GRC.

[Traduction]

La violence fondée sur le sexe

L’honorable Mary Coyle : Bienvenue au Sénat, monsieur le ministre. Monsieur le ministre, comme vous venez de le mentionner, vous avez annoncé aujourd’hui la nomination de la juge Oland en tant que présidente du comité qui surveillera la mise en œuvre des recommandations de la Commission des pertes massives de la Nouvelle-Écosse et qui produira un rapport sur le sujet. Nous saluons cette décision. Ma question est la suivante : le gouvernement soutiendra-t-il les appels à l’action du rapport final de la Commission sur les pertes massives et de l’enquête sur les meurtres commis dans le comté de Renfrew pour déclarer que la violence fondée sur le sexe est une crise qui a atteint des proportions épidémiques au Canada et, plus important encore, créera-t-il une stratégie globale fédérale visant à s’attaquer à ce problème?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je tiens à vous remercier, sénatrice, d’avoir reconnu l’importance de la nomination de la juge Oland à la présidence du comité qui supervisera et qui coordonnera la mise en œuvre des recommandations formulées dans le rapport final, en particulier, pour les familles.

Je suis d’accord pour dire que nous devons nous attaquer de front aux défis énormes et alarmants liés à la violence fondée sur le sexe, que la commission a abordés de manière réfléchie. C’est un travail que je fais en partenariat avec un certain nombre d’autres collègues, y compris, je tiens à le souligner, la ministre Marci Ien, qui met actuellement en place une stratégie nationale de lutte contre la violence fondée sur le sexe de plus de 600 millions de dollars afin de travailler en étroite collaboration avec les groupes de femmes sur le terrain de manière à pouvoir adopter une approche fondée sur les traumatismes et centrée sur les victimes et ainsi réduire les barrières.

Je pense que vous conviendrez que l’une des plus grandes difficultés de ce travail consiste à encourager les femmes à se manifester et à porter plainte. On m’a dit que ces femmes craignent que la personne à l’autre bout du fil ne les croie pas ou ne les traite pas avec respect. C’est ce qui a conduit à des tragédies et à des pertes. Je vous assure qu’au moment de mettre en œuvre les recommandations de la Commission des pertes massives, nous travaillerons avec la juge Oland, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, les victimes et les survivants de cette tragédie ainsi que toutes les femmes qui ont souffert de ce traumatisme.

L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Ce samedi, il y aura quatre ans qu’a été publié le rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Monsieur le ministre, les familles autochtones veulent savoir ce qui est arrivé à leurs proches, comme le voudrait n’importe quelle autre famille canadienne. Les familles concernées méritent des réponses et il est grand temps que le gouvernement Trudeau traite avec respect les victimes d’actes criminels. En 2021 et en 2022, j’ai demandé au gouvernement Trudeau quels étaient les progrès accomplis par la GRC pour faire la lumière sur les affaires non résolues. Je n’ai pas obtenu de réponse satisfaisante, mais, bien franchement, ce n’est pas étonnant. Monsieur le ministre, quels progrès ont été réalisés dans les affaires non résolues depuis la publication du rapport final en 2019? Les enquêtes de la GRC ont-elles débouché sur des arrestations, des accusations ou des condamnations?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Premièrement, monsieur le sénateur, je tiens à dire que je partage votre préoccupation et celle de tout le monde concernant les affaires non résolues parce que ces femmes et ces jeunes filles méritent qu’on leur rende justice. C’est d’ailleurs pour cette raison que le gouvernement a mis sur pied l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées, une commission qui n’avait jamais existé auparavant, mais que nous avons créée parce que nous voulons que justice soit faite aux victimes et aux survivantes.

Pour ce qui est de l’état d’avancement des enquêtes en suspens et des affaires non résolues, de toute évidence, il vaudrait mieux vous adresser à la GRC ou à toute autre force de police chargée de ces affaires. Néanmoins, je me réjouis de collaborer avec vous, monsieur le sénateur, pour obtenir les dernières nouvelles à ce sujet. Je sais que le temps dont nous disposons ici tire à sa fin, mais j’espère, sénateur Plett, que vous assisterez à la séance d’information technique sur le projet de loi C-21, que le gouvernement a proposée. Il est important que nous travaillions de concert pour sauver des vies, en adoptant des lois responsables sur le contrôle des armes à feu.

Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes (Sénat)

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Eh bien, puisque vous me parlez de la séance d’information technique, monsieur le ministre, permettez-moi de vous poser une question. Hier, le secrétaire parlementaire du sénateur Gold, Mark Gerretsen, a écrit ceci sur Twitter : « Je demande au sénateur @DonPlett d’arrêter de faire de l’obstruction et de sévir contre la criminalité en adoptant le projet de loi C-21. » Le projet de loi n’a toujours pas été présenté au Sénat, monsieur le ministre. Le Sénat en a été saisi il y a deux séances. Le parrain du projet de loi n’a toujours pas prononcé de discours. Je trouve étrange que le député en question soit secrétaire parlementaire au Sénat depuis un an et demi et qu’il n’ait toujours aucune idée de la façon dont le Sénat fonctionne. Pourquoi Mark Gerretsen m’accuse-t-il de faire obstruction à un projet de loi que le parrain du gouvernement n’a toujours pas présenté à l’étape de la deuxième lecture? Croyez-vous que cette attaque personnelle injustifiée était nécessaire?

L’honorable Marco E. L. Mendicino, c.p., député, ministre de la Sécurité publique : Je ne savais pas que le représentant du gouvernement au Sénat avait un secrétaire parlementaire. Je vous assure, sénateur, que nous travaillerons en étroite collaboration avec vous et l’ensemble des sénateurs pour que le projet de loi C-21 fasse l’objet d’un débat bien réfléchi.

(1520)

Je prends un instant pour souligner que ce projet de loi contient de bonnes politiques. Il renforce l’interdiction des armes à feu de type AR-15. Il impose un gel national des armes de poing. Il augmente la peine maximale pour les trafiquants d’armes endurcis. Il instaure des protocoles de signalement et d’intervention d’urgence, des sortes de « drapeau jaune » et de « drapeau rouge » pour renverser la tendance qui fait que violence conjugale et violence armée vont souvent de pair. Ce projet de loi comprend beaucoup de mesures judicieuses, monsieur le sénateur. Ma seule demande est que nous travaillions ensemble pour que cette mesure entre en vigueur afin de que nous puissions sauver des vies dès que possible.

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, la période de questions est maintenant terminée. Je suis convaincue que tous les sénateurs se joindront à moi pour remercier le ministre Mendicino de s’être joint à nous aujourd’hui.

[Français]

Nous allons reprendre les travaux qui ont été interrompus au début de la période des questions.


[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 6 juin 2023, à 14 heures.

Langues officielles

Préavis de motion concernant la composition du comité

L’honorable Brian Francis : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou tout ordre antérieur, l’honorable sénatrice Gagné soit remplacée à titre de membre du Comité sénatorial permanent des langues officielles par l’honorable sénatrice Audette.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude du treizième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

La Loi sur les juges

Projet de loi modificatif—Adoption du treizième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

Le Sénat passe à l’étude du treizième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi sur les juges, avec des amendements), présenté au Sénat le 18 mai 2023.

L’honorable Brent Cotter propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, la Loi sur les juges s’applique aux juges nommés par le gouvernement fédéral, comme beaucoup d’entre vous le savent, que l’on appelle souvent les juges des cours supérieures. Il s’agit, par exemple, des juges de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse ou de la Cour du Banc du Roi de la Saskatchewan, de la Cour canadienne de l’impôt, des tribunaux fédéraux, de la Cour d’appel fédérale, des cours d’appel de tout le pays et de la Cour suprême du Canada. Elle ne s’applique pas aux juges des tribunaux provinciaux, qui relèvent des compétences provinciales.

Le projet de loi C-9 vise à modifier la Loi sur les juges en modernisant le régime par lequel les juges nommés par le gouvernement fédéral font l’objet d’une enquête pour inconduite conformément aux responsabilités du Conseil canadien de la magistrature. Il s’agirait d’un nouveau système pour les procédures relatives à l’inconduite des juges.

Les objectifs de ce projet de loi — et j’espère que son parrain, le sénateur Dalphond, nous en parlera un jour — consistent à améliorer l’efficacité du système et, par conséquent, à diminuer les retards et les coûts. Dans certains cas, comme vous pouvez le conclure d’après les discussions qui ont eu lieu dans cette enceinte lorsque ce projet de loi y a été présenté, des millions de dollars de fonds publics ont été engloutis dans des processus longs et parfois douteux menant à l’examen de l’inconduite des juges.

Les changements clés apportés au projet de loi incluent la possibilité d’imposer des sanctions autres que le simple fait de recommander la révocation, et le fait de limiter la possibilité, pour un juge, de demander un examen judiciaire. De plus, l’examen judiciaire effectué par les cours fédérales est remplacé par un mécanisme du Conseil canadien de la magistrature et le droit de présenter une demande d’appel directement à la Cour suprême du Canada.

Le nouveau processus en matière d’inconduite du Conseil canadien de la magistrature comporte cinq étapes possibles pour examiner une plainte contre un juge d’une cour supérieure. Le nouveau processus proposé — je vais tenter d’être bref — commence par un premier contrôle mené par un représentant du conseil. Toute plainte qu’on n’estime pas être dénuée de tout fondement ou qui ne devrait pas l’être sera examinée par un membre du comité d’examen, qui pourra rejeter la plainte ou la soumettre au comité d’examen. Le comité d’examen peut rejeter la plainte ou y donner suite et imposer des mesures de réparation, comme ordonner que le juge suive un cours de perfectionnement professionnel ou qu’il présente des excuses, sans toutefois aller jusqu’à la révocation.

Si un juge souhaite faire appel, il peut porter l’affaire devant un comité d’audience restreint — ou devant un comité d’audience plénier si le geste qui lui est reproché est passible de révocation. Les comités d’audience pléniers fonctionnent comme un tribunal public, avec une audience classique et une audience contradictoire. Le comité plénier détermine alors si la révocation doit être recommandée ou non.

Si le juge en cause ou l’avocat chargé de présenter l’affaire — un peu comme un procureur — souhaite faire appel de la décision du comité d’audience plénier, l’affaire est renvoyée à un comité d’appel, qui a les mêmes pouvoirs qu’une cour d’appel et qui fonctionne comme tel. Si, au bout du compte, le comité d’appel recommande la révocation du juge, le seul recours qui resterait à celui-ci, selon la version du projet de loi que le Sénat a reçue, serait de s’adresser à la Cour suprême. Si la décision recommandant la révocation est maintenue et que tous les recours sont épuisés, la recommandation est transmise au ministre de la Justice, qui peut saisir les deux Chambres du Parlement de la question. Ce processus se veut à la fois rigoureux et respectueux de l’indépendance de la magistrature.

Lors de l’étude du projet de loi C-9 au comité, six amendements ont été apportés au projet de loi C-9. Je vais essayer de les souligner brièvement afin que vous sachiez quels changements ont été apportés aux fins d’examen par le Sénat.

Tous les amendements de fond au projet de loi qui ont été adoptés s’appliquent à l’article 12. Cela semble simple. Cependant, l’article 12 comporte 81 éléments. Il est au cœur du changement.

Je ne lirai pas les 81 éléments, mais ils constituent l’essentiel du projet de loi C-9. C’est là que les changements sont établis, à une exception technique près. Le premier amendement adopté par le comité, qui figure dans votre rapport, modifie différents éléments de l’article 12 afin d’ajouter un non-juriste à chaque étape du processus décisionnel dans l’examen de l’inconduite judiciaire.

Le projet de loi prévoit qu’un non-juriste peut être l’un des trois membres d’un comité d’examen et l’un des cinq membres d’un comité d’audience plénier et que les non-juristes sont désormais inclus dans le processus décisionnel concernant les plaintes anonymes et dans ce que l’on appelle un « comité d’audience restreint ».

Initialement, il était prévu que le comité d’appel serait composé de cinq juges. L’amendement modifie la composition de ce comité d’appel de sorte qu’il compte trois juges, un avocat et un non‑juriste.

(1530)

Le deuxième amendement porte sur la diversité. Le texte original de l’article 84 disait ceci :

Dans la mesure du possible, le Conseil inscrit sur la liste de juges et la liste de non-juristes des personnes qui reflètent la diversité de la population canadienne.

Deux bassins de candidats seront créés, un pour les juges et un pour les non-juristes, et c’est dans ces bassins que l’on ira puiser les personnes qui devront instruire les plaintes visant les juges. Or, le syntagme « dans la mesure du possible » a été jugé contraignant, inutile et pas à sa place. D’aucuns étaient d’avis qu’il diluait la promesse de diversité, et c’est pourquoi cet amendement le supprime du texte.

Le troisième amendement porte sur la publication des décisions. Selon l’amendement adopté par le comité, le Conseil canadien de la magistrature est tenu de publier le plus rapidement possible les décisions rendues. Le projet de loi exige déjà du conseil qu’il publie les décisions des comités d’audience restreints et pléniers ainsi que leurs motifs, mais notre amendement va plus loin en exigeant qu’il publie aussi toutes les décisions par lesquelles les agents de contrôle, les examinateurs et les comités d’examen rejettent une plainte de même que leurs motifs.

Le quatrième amendement porte sur les inconduites sexuelles. Selon la version initiale du projet de loi C-9, les plaintes pour harcèlement ou pour discrimination fondée sur un motif de distinction illicite ne peuvent pas être rejetées au début du processus et doivent obligatoirement passer à l’étape suivante. Les membres du comité estimaient que l’expression « harcèlement sexuel » était trop pointue et n’englobait pas nécessairement les autres formes d’inconduite sexuelle. L’expression « inconduite sexuelle » a donc été ajoutée aux dispositions de l’article 12 où sont énumérés les types de plaintes qui ne peuvent être rejetés d’emblée.

Le cinquième amendement porte sur la collecte de données désagrégées. Le comité a adopté une série d’amendements afin que les données que recueille le Conseil canadien de la magistrature, et au sujet desquelles il fait rapport, portent aussi sur l’origine ethnique et nationale, l’identité autochtone, la race, la religion, le sexe, le genre et les limitations fonctionnelles et afin que le rapport annuel du conseil fasse état de ces données en les regroupant par catégories.

Enfin, le comité a adopté un amendement pour rétablir la capacité du juge ou de l’avocat chargé de présenter l’affaire — c’est-à-dire, le procureur — d’interjeter appel directement auprès de la Cour d’appel fédérale avant d’avoir recours à la Cour suprême. Le projet de loi avait limité la capacité du juge à interjeter appel à l’extérieur du processus du Conseil canadien de la magistrature : il ne pouvait que présenter une demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême du Canada. Un niveau supplémentaire a été rétabli. Avec l’amendement, les décisions du Conseil canadien de la magistrature pourraient d’abord être entendues à la Cour d’appel fédérale, puis le juge ou l’avocat chargé de présenter l’affaire pourrait demander d’interjeter appel auprès de la Cour suprême du Canada.

De plus, il y a un petit amendement de coordination pour harmoniser l’article 16 avec ce que prévoit cet amendement, qui réintègre la Cour d’appel fédérale dans le processus.

En conclusion, permettez-moi de dire que le comité a apporté une longue série d’amendements à la mesure législative. Le projet de loi vise la modernisation d’un processus vieux d’environ 40 ans qui a été la cible de nombreuses critiques. Je pense qu’il mérite l’attention du Sénat dans le but de moderniser le processus en cas d’inconduite judiciaire.

Merci.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : J’ai quelques questions à poser au sénateur, s’il le veut bien.

Le sénateur Cotter : Je les accueille avec plaisir.

Le sénateur Plett : Sénateur Cotter, je vous remercie du rapport. Nous l’attendions tous avec impatience, et le voici.

Sénateur Cotter, je constate que le comité a décidé de ne pas adopter un amendement au projet de loi concernant l’inclusion d’une suspension sans traitement dans la liste de mesures disciplinaires possibles, même si cela a été recommandé par les témoins. Le projet de loi C-9 inclut d’autres mesures disciplinaires moins sévères, par exemple, une réprimande nécessitant des excuses, mais il saute ensuite à la pénalité très grave de la révocation du juge en cause, sans aucune autre mesure entre les deux. Étant donné que selon le Conseil de la magistrature de l’Ontario, la suspension sans traitement semble bien fonctionner en Ontario, et que d’autres témoins l’ont aussi demandée, pourquoi le comité aurait-il finalement décidé de ne pas l’inclure dans le projet de loi?

Le sénateur Cotter : Comme on peut lire sur la pierre tombale d’une personne, « Je m’y attendais ». Sénateur Plett, je m’attendais à cette question, alors je vous remercie. Bien que je sois tenté de dire que le sénateur Dalphond pourrait fournir une réponse plus complète, permettez-moi de partager avec vous — au nom du comité — les délibérations et ce que je pense être, peut-être, les facteurs déterminants qui ont conduit le comité à voter contre l’adoption de l’amendement. L’amendement a été soigneusement étudié et considéré à l’avance par la sénatrice Batters et le comité.

Il est vrai qu’un certain nombre de provinces ont inclus cette sanction dans leurs procédures relatives à l’inconduite de juges des tribunaux provinciaux; vous avez raison sur ce point. Certains des témoins les plus éloquents l’ont suggéré. En fait, le professeur Richard Devlin, de l’école de droit Schulich de l’Université Dalhousie, est probablement le spécialiste universitaire le plus éminent sur le sujet, et c’est l’une des recommandations qu’il a formulées.

On a exprimé des réserves au sujet de l’amendement en avançant deux arguments. L’un d’eux est d’ordre pratique : si la sanction est la suspension d’un juge avec salaire, cela signifie généralement que ce juge prend des vacances gratuites. C’est embarrassant pour le juge, mais cela impose un fardeau aux autres juges, qui doivent assumer la charge de travail de ce juge. On n’a pas l’impression que c’est une véritable sanction.

De son côté, le deuxième argument est un peu plus subtil, c’est un élément que les représentants du ministère de la Justice ont soulevé et que, je peux le dire sans me tromper, le sénateur Dalphond a défendu avec vigueur : la rémunération des juges est assujettie à un processus de révision enchâssé dans la loi et qui a lieu tous les quatre ans. Autrement dit, le fait de réduire le salaire d’un juge pourrait être considéré comme un acte inconstitutionnel. Si l’on inflige une période de suspension à un juge, même à titre de sanction, et que cela entraîne une réduction de sa paie, cela donne lieu à un argument de poids — je ne dirais pas un argument déterminant — pour établir qu’il y a entrave inconstitutionnelle à l’indépendance de la magistrature.

Pour donner suite à ce que la sénatrice Batters a si bien expliqué, je crois qu’il n’y a aucun doute sur les lacunes dans l’échelle des sanctions. Toutefois, pour ce qui est de la magistrature, cette question présentait des problèmes différents par rapport à d’autres secteurs qui nous sont plus familiers à vous et à moi-même, entre autres en ce qui concerne les avocats et les policiers.

C’est la meilleure réponse que je peux vous fournir pour décrire le processus de réflexion du comité pour en arriver à la décision de ne pas adopter cet amendement.

Le sénateur Plett : J’espère pouvoir poser une autre question. Ce n’est pas la première fois que l’on m’accuse d’être prévisible, je ne m’en offusquerai donc pas non plus dans ce cas-ci.

Sénateur Cotter, j’ai également remarqué que le ministre Lametti a été invité à comparaître une deuxième fois devant le comité pour répondre à des questions des membres du comité, bien sûr, lorsque vous avez commencé à examiner les amendements lors de l’étude article par article. Le ministre a décliné l’invitation. Il me semble que le ministre aurait dû être ravi de comparaître s’il était invité par le comité à contribuer à ce qui s’est avéré être un processus assez difficile concernant un projet de loi très difficile — je ne veux pas utiliser le mot « alambiqué ». Pourquoi le ministre a-t-il refusé de témoigner?

Le sénateur Cotter : Étant donné que je peux difficilement lire dans les pensées des gens, j’ignore les raisons qui ont poussé le ministre Lametti à décliner l’invitation. C’était une requête formulée par le comité, car nous pensions que ce serait l’occasion d’engager un dialogue sur d’éventuels amendements que le comité pourrait envisager. Nous aurions aimé qu’il comparaisse avant l’examen article par article du projet de loi. Je n’ai pas d’explication. Je pense que son intervention nous aurait été utile et qu’il aurait pu nous donner une raison de refuser ou d’accepter ces amendements. J’ignore pourquoi il a refusé l’invitation.

Comme vous le savez probablement, il s’agit d’un projet qui s’est déroulé sur plusieurs années, et qui vise à mettre en place un système moderne qui fait intervenir le Conseil canadien de la magistrature, l’Association canadienne des juges des cours supérieures, le ministère de la Justice, et le ministre de la Justice. Il s’agit d’une démarche délicate qui consiste à mettre en place un régime moderne et efficace d’examen des cas d’inconduite de la part des juges.

Bien que je ne cherche pas à défendre le ministre Lametti, sa comparution au comité a été remarquable, et il a peut-être estimé qu’il était suffisant de comparaître une seule fois par projet de loi.

Son Honneur la Présidente : Sénateur Cotter, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

Le sénateur Cotter : Oui.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(1540)

L’honorable Denise Batters : Merci. Je l’apprécie.

Tout d’abord, je vais donner une explication solide de mon amendement, qui prévoyait une suspension avec ou sans solde — la suspension sans solde n’aurait duré que 30 jours. Nous en discuterons prochainement, et vous obtiendrez une explication complète de ma position à ce sujet.

Sénateur Cotter, je voulais vous poser quelques questions très générales. Je vous remercie pour l’explication concernant le nombre d’amendements, mais je ne pense pas que les renseignements suivants figuraient dans votre rapport: combien de réunions notre comité a-t-il tenues et combien de témoins a-t-il entendus?

Le sénateur Cotter : Beaucoup. Je vous communiquerai les détails dès que possible.

La sénatrice Batters : J’ai commencé à préparer mon discours pour l’étape de la troisième lecture, alors je crois connaître la réponse. Je pense que sept réunions entières ont été consacrées à des témoignages et que l’étude article par article a ensuite duré pendant trois réunions. Il y a donc eu pas mal de réunions. Je ne crois pas avoir fait le calcul du nombre de témoins encore, mais nous aurons la réponse. En comparaison, le Comité de la justice de la Chambre des communes n’a tenu que trois réunions pour étudier le projet de loi et une seule pour l’étude article par article, alors on peut dire que le Sénat a fait du bon travail.

Il y a une autre chose que je voulais vous demander, sénateur Cotter. Même si le projet de loi a obtenu beaucoup d’attention médiatique depuis qu’il a été présenté pour la première fois au Sénat, bien des sénateurs ne savent peut-être pas ceci. Il y a présentement une affaire très médiatisée concernant des procédures disciplinaires visant un juge de la Cour suprême. À ma connaissance — c’est également ce que le ministre de la Justice Lametti a indiqué —, le projet de loi à l’étude ne s’appliquerait pas dans cette affaire, parce qu’il n’a pas encore été adopté. Est-ce bien le cas? Seules les affaires qui surviendront après l’entrée en vigueur du projet de loi C-9 devront suivre le nouveau processus disciplinaire et toutes les affaires en cours continueront d’être traitées dans le système actuel; est-ce exact?

Le sénateur Cotter : Je crois que vous avez raison, sénatrice Batters. C’est d’ailleurs une bonne raison pour agir assez rapidement afin qu’un régime moderne soit mis en place avant que de nouvelles plaintes soient déposées au sujet de juges des cours supérieures. Au sujet de l’affaire à laquelle vous faites référence, c’est l’ancien système qui s’appliquera.

Le sénateur Plett : Ma question est fort simple, sénateur Cotter. Je n’aime pas le fait qu’un ministre ait refusé de comparaître. Nous avons en quelque sorte un principe qui dit « pas de ministre, pas de projet de loi ». Je comprends que nous ne puissions pas toujours tous les faire comparaître. Cela dit, sénateur Cotter, de quelle manière devrions-nous gérer ce genre de situation à l’avenir? Que devrions-nous faire lorsqu’un comité, et plus particulièrement le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, a des questions à poser à un ministre, mais que celui-ci refuse de comparaître?

Le sénateur Cotter : Merci, sénateur Plett. Je vais répondre brièvement. La présidence de comité est un rôle assez récent pour moi, donc je n’ai pas toute l’expérience que vous possédez concernant la comparution de ministres ou leur refus de comparaître devant un comité. Je suis convaincu qu’à un moment donné, il devient excessif de demander à un ministre de comparaître plus d’une fois au sujet d’un même projet de loi. Les questions étaient importantes. Ces éléments ont tous été abordés avec le ministre la première fois qu’il a comparu. Nous avions peut-être des questions plus pointues à l’approche de l’étude des amendements, mais ce n’est pas comme si nous n’avions pas entendu le ministre concernant les aspects litigieux.

Son Honneur la Présidente : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence, et le rapport est adopté.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dalphond, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu)

Deuxième lecture—Débat

L’honorable Hassan Yussuff propose que le projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu), soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à propos du projet de loi C-21, Projet de loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu).

Chers collègues, je tiens à reconnaître dès le début de ce débat qu’il n’est jamais facile de discuter des armes à feu. Ce sujet est généralement fort émotif et source d’opinions bien tranchées, mais aussi de division et de polarisation, car il s’agit de vie et de mort, de la sécurité des collectivités, ainsi que des droits et des privilèges des Canadiens.

Pour certains, les armes à feu sont des outils. Ils les utilisent pour protéger leurs animaux d’élevage, pour se protéger dans la nature, pour chasser à des fins récréatives ou pour se nourrir, ou pour viser une cible lors d’une compétition. D’autres n’utilisent les armes à feu que pour s’amuser. Pour d’autres encore, les armes à feu, en particulier celles que l’on considère comme des armes d’assaut, sont des instruments grotesques de mort et de destruction qui ont causé des douleurs et des souffrances immenses à des innocents et qui n’ont pas leur place dans notre société. Je sais que le débat ne sera pas facile et je m’attends à ce que les collègues de cette enceinte aient des opinions bien arrêtées dans les deux camps.

Chaque fois qu’un gouvernement restreint ou limite la capacité des citoyens de posséder des biens comme des armes à feu, il nous revient, en tant que législateurs, de nous pencher sérieusement là‑dessus. Honorables collègues, je considère que ce projet de loi vise essentiellement à établir un juste équilibre entre le droit des Canadiens de vivre dans des collectivités sécuritaires et le privilège accordé à des Canadiens de posséder certains types ou modèles d’armes à feu pour la chasse ou le tir sportif. Trouver le juste équilibre n’est pas chose facile.

Selon certains militants pour le contrôle des armes à feu, ce projet de loi ne va pas assez loin. D’après certains militants pour les droits des propriétaires d’arme à feu, il va trop loin. Au cours du débat, j’aimerais que vous songiez à cet équilibre entre les droits et les privilèges de la population. Au bout du compte, j’estime que le projet de loi permet d’établir un juste équilibre entre le droit des Canadiens de vivre dans des collectivités sécuritaires, en réduisant le nombre d’armes à feu en circulation, et le privilège des Canadiens d’utiliser certains modèles d’arme à feu pour le tir sportif, le tir sur cible, la collection, la chasse, et cetera.

Honorables sénateurs, aujourd’hui, j’aimerais parler de ce que ce projet de loi vise à faire et dissiper certaines idées fausses en précisant ce qu’il ne vise pas à faire. Il n’y a pas de solution miracle pour combattre la violence armée, et ce projet de loi ne se veut pas une solution miracle. C’est tout simplement une solution de plus à un problème très complexe pour rendre les collectivités plus sécuritaires, et elle s’inscrit dans un ensemble de mesures que j’aimerais maintenant expliquer plus en détail.

Tout d’abord, le projet de loi C-21, présenté il y a un an, codifierait dans la loi un gel national sur la vente, l’achat et le transfert d’armes de poing, qui est entré en vigueur par voie réglementaire le 21 octobre 2022. Cela signifie que tout détenteur légal d’une arme de poing qui en possédait une avant le 21 octobre de l’année dernière peut la conserver et l’utiliser. Il ne pourra toutefois pas acheter de nouvelles armes de poing, ni transférer ou vendre ses armes de poing, et personne qui n’avait pas d’arme de poing en octobre dernier ne pourra en acquérir une.

Dans la population en général, il n’existe que des raisons limitées faisant en sorte que quelqu’un est autorisé à acquérir ou à posséder une arme de poing, qui est une arme à feu à autorisation restreinte, notamment pour une collection ou pour le tir à la cible ou des compétitions de tir à la cible. La chasse n’est pas une raison reconnue.

Je tiens à préciser que le gel des armes de poing n’empiète aucunement sur les privilèges qui permettent aux Canadiens de chasser. L’interdiction des armes de poing restreint uniquement le privilège d’environ 275 000 Canadiens de collectionner des armes de poing et de les utiliser pour le tir sportif ou récréatif.

La prévalence des armes de poing au Canada ne cesse d’augmenter. Entre 2010 et 2020, le nombre d’armes de poing a augmenté de 74 % pour atteindre 1 million d’armes de poing détenues par environ 275 000 personnes dans notre pays.

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Des recherches indiquent qu’il y a une corrélation entre la disponibilité des armes à feu et le nombre de crimes, d’actes de violence et d’utilisations illégitimes impliquant une arme à feu. En limitant l’accessibilité aux armes de poing et en gelant la vente, l’achat et le transfert de ces armes, le gouvernement prévoit limiter l’augmentation du nombre d’armes de poing personnelles et ainsi réduire la violence liée aux armes à feu.

Le projet de loi comprend aussi d’autres mesures importantes visant à s’attaquer au rôle alarmant que jouent les armes à feu dans la violence fondée sur le sexe grâce à des dispositions permettant d’intervenir rapidement. Il prévoit aussi renforcer les contrôles aux frontières en augmentant les peines maximales pour les trafiquants d’armes; conférer des pouvoirs pour lutter contre la contrebande et le trafic d’armes à feu et les infractions qui y sont liées; modifier la définition d’« arme à feu prohibée » qui se trouve dans le Code criminel afin d’y inclure une nouvelle description technique concernant les armes à feu de style armes d’assaut, qui ne s’appliquerait qu’aux armes à feu conçues et fabriquées après la date d’entrée en vigueur du projet de loi; et s’attaquer à la menace grandissante que représentent les armes à feu fabriquées illégalement, aussi appelées « armes fantômes ».

Comme ces deux dernières mesures sont particulièrement importantes, j’aimerais commencer avec elles mon explication de l’objectif de ce projet de loi.

Le projet de loi C-21 ajoute une toute nouvelle définition technique portant sur les caractéristiques d’une arme à feu de style arme d’assaut à la définition d’« arme à feu prohibée » qui se trouve dans le Code criminel. La future et nouvelle définition se concentre sur les armes à feu semi-automatiques à percussion centrale qui ne sont pas des armes de poing et qui ont été conçues à l’origine avec un chargeur détachable d’une capacité de six cartouches ou plus.

Il est important de noter que cette nouvelle définition ne s’appliquera qu’à titre prospectif, c’est-à-dire qu’elle ne concernera que les armes à feu conçues et fabriquées après la date d’entrée en vigueur de cette disposition. Je tiens à préciser qu’aucune arme légale à feu semi-automatique et à percussion centrale actuellement en circulation qui n’est pas une arme de poing ne sera concernée par cette nouvelle définition.

En intégrant des critères techniques dans cette définition, on demande à l’industrie de jouer son rôle dans la protection de nos communautés contre ces armes dangereuses. Comme je viens de le dire, cela n’aura pas d’incidence sur la classification des armes à feu existantes sur le marché canadien.

La proposition de définition technique prospective des caractéristiques des armes à feu de type arme d’assaut nous permet de réagir de manière proactive aux progrès réalisés sur le marché des armes à feu et de tenir à l’écart de nos communautés les armes à feu conçues pour tuer le plus grand nombre de personnes le plus rapidement et le plus facilement possible. Cela fait partie de l’ensemble des mesures visant à assurer la sécurité des Canadiens. Nous avons assisté à beaucoup trop de tragédies, y compris celles qui ont eu lieu récemment en Nouvelle-Écosse, en Ontario et au Québec.

Le gouvernement a clairement indiqué que les armes à feu conçues pour la guerre, comme le AR-15, qui sont capables de tirer rapidement et d’infliger des dommages catastrophiques, n’ont pas leur place dans nos collectivités. Le projet de loi C-21 prévoit que le Parlement procède à un examen de la nouvelle définition technique d’une « arme à feu prohibée » au bout de cinq ans, ce qui permettra de déterminer si les objectifs des modifications proposées sont atteints. Le projet de loi C-21 apporte également plusieurs changements visant à contrôler l’achat — c’est-à-dire le transfert ou l’importation — de chargeurs de cartouches en exigeant un permis d’armes à feu valide.

Ces changements législatifs ont été largement appuyés par les deux côtés ainsi que par les Canadiens durant l’étude article par article du projet de loi à l’autre endroit. Sénateurs, ces changements répondent directement à la recommandation C.21 du rapport final de la Commission des pertes massives.

À mon avis, il s’agit d’une mesure sensée. Je vais vous donner un exemple concret pour vous expliquer pourquoi. En 2018, à Toronto, un tireur a tué 2 personnes et en a blessé 13 lors de ce qu’on appelle maintenant « la fusillade de l’avenue Danforth ». L’auteur de cette fusillade ne détenait pas de permis de possession d’arme, mais il était quand même légalement autorisé à acheter les chargeurs dont il s’est servi pour tuer et blesser ses 15 victimes.

Je ne détiens pas de permis de possession d’arme. Cependant, sénateurs, je peux me rendre à un magasin maintenant et acheter un chargeur pour une arme à feu légale sans présenter de permis. Comment peut-on justifier cela?

Le projet de loi prévoit aussi des mesures pour cibler les « armes fantômes », qui sont des armes à feu fabriquées illégalement. Souvent, on se sert de l’impression 3D, qui peut utiliser le plastique, le métal ou des résines époxydes. Dans d’autres cas, diverses pièces sont assemblées, ce qui peut mener à des armes à feu sans numéro de série ou avec plusieurs numéros. Ces armes fantômes sont dangereuses : en plus de pouvoir servir à des actes violents, ces armes non identifiées et impossibles à dépister sont le choix privilégié pour un grand nombre d’activités criminelles. La facilité avec laquelle on peut trouver en ligne des schémas gratuits pour imprimer en 3D des composantes d’armes à feu est troublante.

Autre point tout aussi troublant, il est impossible de savoir exactement le nombre d’armes fantômes dans les rues au Canada aujourd’hui. Ce que nous savons, c’est que l’Agence des services frontaliers du Canada constate une augmentation du nombre de pièces d’armes à feu non contrôlées qui traversent la frontière. C’est lié à la production d’armes à feu illégales au Canada, et plusieurs de ces pièces sont essentielles à l’impression en 3D des armes fantômes.

Par exemple, en août 2022, l’Agence des services frontaliers du Canada a annoncé deux saisies importantes d’armes fantômes en Colombie-Britannique grâce à des interceptions dans des centres de distribution du courrier international. Cette découverte a mené à la saisie d’une imprimante 3D qui était en train d’imprimer une carcasse inférieure pour une arme de poing, de six carcasses pour arme de poing sans numéro de série et d’une arme de poing de 9 millimètres chargée, sans numéro de série.

En février 2022, l’Agence des services frontaliers du Canada a annoncé les résultats d’une enquête sur les armes à feu imprimées en 3D à la suite de l’interception, dans un centre de traitement de l’Ontario, de composantes d’armes à feu non déclarées, notamment des pièces métalliques couramment utilisées pour renforcer les armatures en plastique des armes de poing imprimées en 3D. L’enquête a abouti à la saisie de deux armes de poing imprimées en 3D et d’une imprimante 3D.

Les conséquences des armes à feu imprimées en 3D sont stupéfiantes, chers collègues. C’est exactement pourquoi elles sont visées par le projet de loi C-21.

Les mesures proposées modifieraient la Loi sur les armes à feu de manière à ce que les entreprises ou les particuliers qui vendent certaines pièces d’armes à feu soient tenus de confirmer que l’acheteur est titulaire d’un permis d’armes à feu en règle. Cette disposition s’apparente à l’obligation existante qui consiste à vérifier que les particuliers qui achètent des munitions possèdent un permis d’armes à feu valide.

D’autres dispositions proposées classeraient les armes à feu fabriquées illégalement dans la catégorie des armes à feu interdites et érigeraient de nouvelles infractions visant les armes fantômes, y compris la possession et la distribution de fichiers numériques pour l’impression en 3D d’armes à feu ou de dispositifs interdits à des fins de fabrication ou de trafic illégaux. Ces modifications relatives aux armes fantômes ont reçu le soutien unanime de tous les membres du comité chargé d’étudier le projet de loi à l’autre endroit.

Honorables sénateurs, j’aimerais me pencher sur un autre groupe d’importantes dispositions prévues dans le projet de loi C-21, qui visent à réduire la violence familiale liée aux armes à feu et l’automutilation. Les statistiques révèlent que les victimes de violence entre partenaires intimes sont environ cinq fois plus susceptibles d’être tuées par une arme à feu s’il y en a une au domicile. Voilà pourquoi de nouvelles mesures d’intervention d’urgence permettront aux tribunaux d’ordonner la saisie immédiate des armes à feu des personnes qui constituent une menace pour elles-mêmes ou pour autrui. Qui plus est, d’autres mesures de signalement permettront au contrôleur des armes à feu de suspendre un permis s’il reçoit des renseignements portant à croire que le titulaire n’y est plus admissible.

Ces mesures de signalement et d’intervention d’urgence ont récemment été renforcées par des modifications permettant de révoquer dans les 24 heures le permis d’arme à feu de quiconque se serait rendu coupable de violence familiale ou de violence entre partenaires intimes et de faire rapport aux autorités compétentes, dans les 24 heures, de toute ordonnance d’interdiction de port d’armes ou de protection.

Ces modifications prévoient clairement que les professionnels de la santé sont tenus de communiquer toute information pertinente si un patient peut constituer un danger pour lui-même ou pour autrui. Par ailleurs, il va sans dire qu’on ne divulguera pas l’identité de personnes vulnérables qui fournissent des renseignements aux tribunaux.

Je tiens à ce qu’il soit clair que les victimes ne seront pas tenues de recourir à ces dispositions législatives, qui visent simplement à offrir une protection additionnelle.

J’aimerais également présenter quelques autres statistiques importantes aujourd’hui.

Son Honneur la Présidente : Sénateur Yussuff, je dois vous interrompre. Toutefois, vous disposerez du reste de votre temps de parole lorsque cet article sera appelé.

(À 16 heures, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 21 septembre 2022, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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